Internet et l'Afrique : une aide au développement ?



Bernard Conte


Introduction

Le développement des technologies de l'information et de la communication (TIC) s'opère de façon globalement exponentielle mais différenciée au Sud et au Nord. Le Sud accuse un retard certain. Ce retard est très sensible en Afrique pour des raisons tenant principalement au manque ou à la déficience des infrastructures de communication. En effet, « l'environnement africain de l'information et des communications présente les caractéristiques suivantes : faibles taux de pénétration du téléphone, faible croissance des réseaux, systèmes dépassés, réinvestissement de bénéfices qui laisse à désirer, tarification élevée des installations privées, liaisons téléphoniques interurbaines médiocres et infrastructures de réseaux nationaux très variables » [ECA 1999, p. 8].

Selon le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), parmi les TIC, Internet apparaît comme la technologie qui véhicule le plus d'espoirs notamment pour le Sud et plus particulièrement pour l'Afrique [PNUD, 1999] en raison de sa capacité à effacer les distances et les obstacles à l'accès l'information laquelle constitue un élément d'une importance croissante dans le processus de développement humain. Internet enregistre une croissance rapide en Afrique, la progression des abonnements a été de 92 % entre juillet 1998 et septembre 1999, d'après les statistiques de l'Institut international pour la communication et le développement (IICD)1. Néanmoins, d'importantes disparités régionales existent : l'Afrique du Sud et le Maghreb apparaissant les mieux dotés2. Ces écarts, au sein du continent, se révèlent toutefois moins importants que ceux constatés à l'échelle de la planète, entre l'Afrique et le reste du monde. Malgré la nette augmentation du nombre d'utilisateurs d'Internet sur le continent, on ne dénombrait en 1999 qu'un internaute pour 1 000 habitants, contre 1 pour 4 aux Etats-Unis, la moyenne mondiale se situant aux alentours de 1 pour 40.

Dans ce contexte, de nombreux acteurs internationaux et nationaux du développement mettent en ½uvre des projets susceptibles d'amener à combler le retard africain dans le domaine d'Internet3. Ces projets mettent en avant, selon leur initiateur, le rôle du marché ou celui de l'Etat. Toutefois, ils reposent conjointement sur l'existence d'éventuelles liaisons fortes entre un certain nombre de variables et le développement d'Internet. Au niveau mondial, une étude réalisée par l'Union internationale des télécommunications [ITU, 1997a] soutient que la pénétration globale d'Internet est significativement corrélée à un certain nombre de facteurs : la richesse, la quantité et la qualité des infrastructures de télécommunications, le nombre d'ordinateurs, les coûts des communications téléphoniques et d'accès à Internet, le langage, le taux d'alphabétisation et la formation. En ce qui concerne l'Afrique, une étude de la Banque Mondiale teste les liaisons entre un certain nombre de variables : le nombre d'hôtes Internet par pays africain et la population, le PNB ainsi que le nombre d'ordinateurs personnels [Banque mondiale, SD].

Dans cet article, nous nous proposons d'identifier les facteurs explicatifs de la diffusion d'Internet en Afrique. Pour ce faire, dans une première partie il sera procédé à la vérification empirique des principales assertions sur lesquelles reposent les politiques mises en ½uvre pour promouvoir l'utilisation d'Internet sur le continent africain. Cette démarche permettra de dégager un certain nombre de variables explicatives majeures. Nous tenterons ensuite de construire un modèle explicatif du développement d'Internet. Dans une certaine mesure, les résultats obtenus permettront d'éclairer et d'apprécier les efforts accomplis pour intégrer l'Afrique, à travers Internet, dans la société mondiale de l'information. Ce nonobstant, cette intégration s'avère porteuse d'espoirs, mais également de risques concernant le développement futur du continent. A la lumière des résultats obtenus, la deuxième partie sera consacrée à la présentation de certains enjeux et problèmes soulevés par la diffusion d'Internet en Afrique. Peut-on considérer Internet comme une nouvelle panacée ou un simple outil dont l'utilisation peut sous certaines conditions contribuer au développement du continent ?


I. Les déterminants de la diffusion d'Internet

Les acteurs impliqués dans le développement d'Internet en Afrique fondent leur action sur l'existence d'un certain nombre de liaisons entre ledit développement et certaines variables. Nous allons tenter de procéder à une vérification empirique de ces relations.

Pour ce faire, étant donné le manque de fiabilité des données statistiques4, nous utiliserons des instruments simples et rustiques, mais robustes et nous ne retiendrons que les relations les plus significatives.

L'usage d'Internet sera représenté par le nombre de comptes Internet par pays en mai 1999 [Jensen Mike, 1999a]. A cette date, 49 pays hébergeaient des abonnés à Internet.


Nombre de comptes Internet par pays



N

Minimum

Maximum

Moyenne

Ecart-type

Nombre de comptes Internet

49

50

330 000

11789,3

48857,5


Pour la clarté de l'analyse, il est apparu utile de se référer aux élasticités qui permettront d'apprécier la réponse de la diffusion d'Internet aux variations des paramètres envisagés.

En conséquence, la variable expliquée retenue est le logarithme du nombre de comptes Internet pour 100 habitants dans chaque pays africain (LNCI).

Caractéristiques de la variable LNCI


N

Minimum

Maximum

Moyenne

Ecart-type

LNCI

49

-2,99

0,12

-1,74

0,78


L'investigation portera sur la vérification des liaisons les plus communément admises entre un certain nombre de variables et l'utilisation d'Internet.


  1. Internet et le niveau d'éducation formation :

« L'éducation est un viatique pour entrer dans la haute société en réseau » [PNUD, 1999, p.62]. Pour tenter de vérifier le lien entre le niveau d'éducation formation et l'usage d'Internet en Afrique, quatre régressions ont été opérées. Elles s'avèrent toutes significatives. Les liaisons se révèlent positives mais d'intensité relativement moyenne si l'on se réfère aux valeurs respectives des coefficients de détermination. Paradoxalement, l'importance relative de l'enseignement supérieur semble moins déterminante dans l'usage d'Internet que celle de l'enseignement secondaire. Toutefois, l'étude CABECA menée en 1997-98 dans un petit nombre de pays africains5 [World Bank, SD, p.18], révèle que 87% des utilisateurs d'Internet en Zambie et 98% en Ethiopie possédaient un diplôme de l'enseignement supérieur. Hormis pour l'enseignement supérieur, la valeur des élasticités souligne l'importance de l'éducation formation dans l'usage d'Internet. L'indicateur de niveau d'éducation, avec une élasticité de 2,30 synthétise à lui seul le rôle majeur du système éducatif.




Variables

explicatives


Variable expliquée :


Logarithme du nombre de comptes Internet pour 100 habitants (LNCI)

Logarithme du taux d'alphabétisation des adultes

Logarithme de l'indicateur du niveau d'éducation6

Logarithme du taux de scolarisation secondaire

Logarithme du nombre d'étudiants pour 100 habitants

valeur

-1,17*

-1,02*

-4,46*

-1,17*

Constante

t


-5,84


-4,97


-7,93


5,73

valeur

1,95*

2,30*

1,80*

0,63*

Coefficient de régression

t


3,25


3,96


5,07


3,60






Nombre d'observations

48

48

37

46

0,19

0,25

0,42

0,23

F

10,55*

15,66*

25,71*

13,00*

(*) signification au seuil de 1%, (**) signification au seuil de 5%7.



  1. Internet phénomène urbain :

On pourrait penser qu'Internet est un phénomène essentiellement urbain car les zones urbaines concentrent la majorité des lignes téléphoniques, principal moyen d'accès au réseau mondial. « Dans l'ensemble, les régions urbaines sont le plus souvent relativement bien desservies même si les listes d'attente demeurent importantes et que l'ensemble de la demande n'est pas satisfait. Ainsi, au Sénégal et en Côte d'Ivoire, 80 à 90 % du parc de lignes se trouverait en zones urbaines ou industrielles » [Marchal Jean. 2000, p. 70]. La régression opérée entre la variable LNCI et le logarithme de la population urbaine en pourcentage est significative (F = 16,78). La valeur importante de l'élasticité (1,74) traduit le fait que l'usage d'Internet est un phénomène essentiellement urbain en Afrique.



Variable explicative

Variable expliquée :


LNCI

Logarithme de la population urbaine en pourcentage

valeur

Constante

-4,37*

t

-6,70

valeur

1,74*

Coefficient de régression

t


4,01



Nombre d'observations

48

0,27

F

16,78*



  1. Internet et le niveau de vie :

« L'accès (à Internet) est subordonné au revenu » [PNUD 1999, p. 62]. De nombreux travaux mettent en avant le lien entre le développement d'Internet et le niveau de vie. Les deux régressions portant sur le PNB par habitant et le PIB réel par habitant (PPA) se révèlent significatives. Elles produisent des valeurs du coefficient de détermination assez proches : 0,58 pour le PNB par habitant en dollars courants et 0,52 pour le PIB réel par habitant en PPA. L'intensité de la liaison apparaît plus faible que ce que l'on pouvait attendre8. La différence de valeur entre les coefficients de régression du PNB (1,35) et du PIB réel (1,62) par habitant apparaît conforme aux attentes. En effet, la variation du PIB réel (PPA) retrace plus fidèlement l'évolution du pouvoir d'achat des populations et donc de leur aptitude à assumer les coûts liés à l'usage d'Internet. Il semble logique que l'élasticité de l'usage d'Internet au PIB réel par habitant soit la plus élevée. Les résultats de la troisième régression, portant il est vrai sur un échantillon plus restreint9, révèle conformément aux attentes, une liaison significative robuste (R² = 0,54) entre le revenu des plus riches et l'utilisation d'Internet. La valeur élevée du coefficient de régression (2,17) semble indiquer l'impact des groupes à revenu élevé censés exprimer la majeure part de la demande solvable adressée à Internet.




Variables explicatives


Variable expliquée :


LNCI

Logarithme du PNB par habitant

($ courants)

Logarithme du PIB réel par habitant PPA

PIB réel par habitant PPA des 20% les plus riches

valeur

Constante

t

-5,40*


-11,67

-6,94*


-9,30

-9,47*


-5,58

valeur

Coefficient de régression

t

1,35*


8,01

1,62*


7,03

2,17*


4,59





Nombre d'observations

49

48

20

0,58

0,52

0,54

F

64,16*

49,46*

21,07*



  1. Internet et les échanges extérieurs :

Depuis le début des années 80, la position de l'Afrique au sein de l'économie mondiale s'est profondément détériorée. En effet, sa place dans les échanges internationaux n'a cessé de se dégrader. Toutefois, le continent reste largement tributaire de ses exportations encore essentiellement constituées de produits primaires. Le continent reste également très dépendant de ses importations de biens et services en provenance des pays développés et des nouveaux pays industrialisés (NPI) asiatiques.

Dans ce contexte, le commerce extérieur devrait être un facteur de développement de l'usage d'Internet, technologie appropriée pour des contacts internationaux. Les trois régressions révèlent effectivement une liaison notable entre le commerce extérieur et l'usage d'Internet. Il est à noter que la liaison se révèle plus intense en ce qui concerne les importations. La différence de 6 points du coefficient de détermination entre les importations et les exportations de biens et services (ainsi que les 14 points concernant les élasticités respectives) pourrait s'expliquer du fait de l'importance relative des importations car les échanges extérieurs de biens et services du continent sont déficitaires10. D'autre part, les activités d'importations qui nécessitent des contacts nombreux avec l'extérieur, se révèlent plus atomisées que celles liées à l'exportation qui sont principalement le fait de grandes entreprises moins nombreuses.




Variables explicatives


Variable expliquée :



LNCI

Logarithme des exportations de biens et services pour 100 habitants

Logarithme des importations de biens et services pour 100 habitants

Logarithme des échanges extérieurs de B et S pour 100 habitants

valeur

Constante

t

-9,2E-02


-0,38

0,21


0,87

-0,24


-1,17

valeur

Coefficient de régression

t

0,87*


7,45

1,01*


8,47

0,99*


7,92





Nombre d'observations

40

40

40

0,59

0,65

0,62

F

55,55*

71,69

62,81*


  1. Internet et l'investissement direct étranger :

A l'instar des échanges extérieurs, les investissements directs étranger (IDE) dont le volume en direction des pays du Sud11 s'est fortement accru ces dernières années, devraient se traduire par un développement de l'usage d'Internet. En effet, les IDE sont le fait d'acteurs extérieurs, le plus souvent issus des pays développés, pour lesquels l'usage des TIC est une devenu une nécessité. Dans cette optique, il serait logique que les IDE génèrent une impulsion au développement d'Internet dans les pays d'accueil. Les résultats de la régression entre LNCI et les IDE12 révèlent l'existence d'une liaison significative mais d'intensité relativement moyenne (R² = 0,34). La valeur du coefficient de régression (0,57) traduit une élasticité positive moyenne des abonnements Internet aux IDE.



Variable explicative

Variable expliquée :


LNCI

Logarithme des Investissements directs étrangers (dollars pour 100 habitants)

valeur

-3,11*

Constante

t


-8,71

valeur

Coefficient de régression

t

0,57*


3,94



Nombre d'observations

32

0,34

F

15,53*


  1. Internet et l'entreprise

Malgré les tentatives de démocratisation13, l'usage d'Internet est encore relativement peu développé en Afrique. Le continent ne compterait qu'un utilisateur d'Internet pour 1500 habitants contre une moyenne mondiale d'un utilisateur pour 38 habitants et une moyenne d'un utilisateur pour 4 habitants en Amérique du Nord et en Europe [Jensen Mike, 1999b]. Internet, sauf peut être en Afrique du Sud14, reste encore un outil réservé à une demande solvable restreinte. Il est à penser que les grandes entreprises contribuent pour une large part à cette demande solvable. Pour tenter de vérifier cette hypothèse, deux régressions ont été menées. La première entre LNCI et le logarithme du (nombre d'entreprises nationales +1), classées dans les 500 premières du continent par le chiffre d'affaires [JAE, 1999] par million d'habitants. Ceci afin d'intégrer dans l'analyse, les pays n'ayant aucune entreprise dans le classement continental15. La seconde régression élimine ces pays. Les deux régressions se révèlent significatives avec un coefficient de détermination moyen et à peu de chose près identique. Dans les deux cas, la relation entre les variables est positive : la présence de grandes entreprises sur le territoire national serait un facteur explicatif notable de la diffusion d'Internet. Ce résultat confirme la liaison observée entre LNCI et le commerce extérieur car ces entreprises, de par leur activité, interviennent tant dans les importations que dans les exportations.




Variable explicative

Variable expliquée :


LNCI

Logarithme du nombre d'entreprises nationales classées dans les 500 premières du continent par le CA par million d'habitants

Valeur

Constante

t

-1,35*


-12,58

valeur

Coefficient de régression

t

0,86*


6,26



Nombre d'observations

29

0,59

F

39,14*


  1. Internet, les coûts des télécommunications et d'accès

Les coûts d'accès représentent un facteur important influençant l'usage d'Internet [Jensen Mike, 1998a]. La plupart des pays qui enregistrent une forte pénétration d'Internet ont des coûts d'accès au service relativement faibles. Les coûts d'accès à Internet se décomposent en deux éléments : le coût des communications téléphoniques et le coût d'accès aux fournisseurs de services Internet (FSI). Dans les pays industrialisés, ces coûts sont relativement faibles tant en ce qui concerne les communications que les services des FSI. En Afrique, les coûts sont élevés16 et représentent une charge importante pour les usagers d'Internet et notamment pour ceux qui utilisent un fournisseur d'accès situé en dehors de la zone d'appel local17.

La première régression entre LNCI et logarithme du coût horaire d'une communication locale / PNB par habitant, s'avère significative et d'intensité relativement faible (R² = 0,37). Le coefficient de régression (- 0,72) a le signe négatif attendu signifiant une relation inverse entre les deux variables18.

La deuxième régression entre LNCI et le logarithme du coût total annuel de 5 heures d'accès Internet par mois / PNB par habitant, porte sur un échantillon plus restreint (N = 22) mais produit des résultats similaires.

Les politiques de réduction des coûts d'accès à l'Internet se trouveraient justifiées. Selon les agences internationales d'aide, cette réduction des coûts d'accès passe par la privatisation des office publics de télécommunications ainsi que par la mise en concurrence des fournisseurs de services Internet (FSI) [Jensen Mike, 1996b ; World Bank, 1995 ; ITU, 1998b]. Il est utile de signaler que la privatisation préconisée ne s'avère pas sans risques.



Variables

explicatives

Variable expliquée :


LNCI

Logarithme du coût horaire d'une communication locale / PNB par habitant

Logarithme du coût annuel de 5 heures d'accès à Internet par mois

(dollars US)/ PNB par habitant

valeur

Constante

t

-3,44*


-8,48

-1,68*


13,01

valeur

Coefficient de régression

t

-0,72*


-4,51

-0,75*


-3,72

Nombre d'observations

37

22

0,37

0,41

F

20,38*

13,82*


  1. Internet et les ordinateurs

Dans la plupart des cas, l'accès à Internet implique la disponibilité d'ordinateurs. La régression entre LNCI et le Logarithme du nombre de PC pour 100 habitants montre effectivement l'existence d'une relation positive significative entre ces deux variables. La valeur proche de l'unité du coefficient de régression (0,95) suggère l'efficacité d'un accroissement du nombre d'ordinateurs sur l'usage d'Internet19. Toutefois, l'accroissement du parc de micro-ordinateurs se heurte à un problème de coût. Si l'on considère qu'un ordinateur pouvant se brancher au réseau Internet possède le même coût en Europe qu'en Afrique soit 1000 dollars, ce coût représente 9 fois le PNB par habitant de l'Ethiopie et 5 fois celui du Niger. C'est pour cette raison que se développe le partage des ordinateurs dans des lieux publics tels les écoles, les bibliothèques, les cybercafés et télécentres.



Variable explicative

Variable expliquée :


LNCI

Logarithme du nombre de PC pour 100 habitants

(en 1998)

valeur

Constante

t

-1,24*


-13,77

valeur

Coefficient de régression

t

0,95*


7,57

Nombre d'observations

39



0,61

F

57,38*


  1. Internet et les infrastructures de télécommunication :

Des études économétriques ont révélé un lien de causalité entre le développement des télécommunications et la croissance économique [Canning 1998, 1999 ; Easterly et Levine 1995]. Easterly et Levine soutiennent d'ailleurs que le faible développement des télécommunications est un facteur explicatif important de la faiblesse des taux de croissance en Afrique. Il est vrai que l'Afrique possède l'infrastructure de télécommunications la moins développée du monde. Le continent ne compte que 2 pour cent des postes téléphoniques mondiaux alors qu'il abrite 12 pour cent de la population mondiale. En Afrique subsaharienne par exemple, « la densité globale reste inférieure à un poste téléphonique pour 200 habitants, la plupart des réseaux de télécommunication sont analogiques et bon nombre de sections sont très peu fiables, notamment pendant la saison des pluies » [Jensen Mike, 1998a, p. 8]. « La poursuite de la croissance d'Internet en Afrique est intimement liée à la qualité et la disponibilité d'infrastructures de communications dans ce vaste continent [Banque mondiale, SD, p.2]20 ». Le raccordement à Internet étant tributaire du réseau de télécommunication, il apparaît utile de tester la liaison entre le nombre de comptes Internet et la télédensité21. Une relation significative entre les deux variables se dégage, l'intensité de la liaison s'avère notable (R² = 0,62). La valeur du coefficient de régression supérieure à l'unité (1,05) indique l'impact important de l'infrastructure de télécommunications sur la densité d'usagers Internet. Il est toutefois à noter que la télédensité ne rend pas compte de la qualité de ladite infrastructure ce qui peut expliquer la relative faiblesse du coefficient de détermination. De plus, dans l'avenir, la liaison entre la télédensité et l'usage d'Internet pourrait se relâcher du fait de l'apparition et du développement de nouveaux moyen d'accès n'utilisant pas les lignes téléphoniques fixes (la boucle locale radio par exemple).



Variable

explicative

Variable expliquée :


LNCI

Logarithme de la télédensité


Valeur

Constante

t

-1,65*


-23,50

valeur

Coefficient de régression

t

1,05*


8,84



Nombre d'observations

49

0,62

F

78,07*


Néanmoins, l'importance des infrastructures de télécommunication dans la croissance économique et dans celle des TIC, a fait naître une multitude de projets initiés par des institutions internationales, des agences de coopération bilatérale, des établissements scientifiques et des ONG22. Leur objectif premier est d'aider l'Afrique à entrer dans la société de l'information.


  1. Internet et l'offre :

L'offre est également un élément important de la diffusion d'Internet. Seront envisagés l'influence de la largeur de bande internationale mesurée en kilo-bits par seconde et celle du nombre de fournisseurs d'accès Internet (FSI).

« Pour la plupart des pays africains, le gros problème est d'avoir accès à une largeur de bande internationale suffisante pour pouvoir mener à bien des activités interactives sur l'Internet » [Mike Jensen, 1998a]. La régression entre LNCI et le logarithme de largeur de bande internationale pour 100 habitants révèle une relation significative positive (0,87) entre la densité d'utilisateurs Internet et la largeur de bande internationale. De même, la deuxième régression fait apparaître une relation significative positive entre LNCI et les FSI. L'accroissement de la largeur de bande internationale ainsi que la multiplication des FSI23 pourraient avoir une effet favorable sur la pénétration d'Internet si l'on considère évidemment que l'accroissement de l'offre induit une augmentation parallèle de la demande.



Variables

explicatives

Variable expliquée :


LNCI

Logarithme du nombre de fournisseurs d'accès pour 100 habitants

Logarithme de largeur de bande internationale pour 100 habitants

Valeur

Constante

t

2,71*


4,98

0,26


1,48

valeur

Coefficient de régression

t

1,05*


8,25

0,87*


12,13




Nombre d'observations

49

49

0,59

0,76

F

67,98*

147,11*


Un certain nombre de relations, sur lesquelles se fondent implicitement les politiques de développement des TIC en Afrique, ont été mises en évidence. Pour la plupart, ces relations s'avèrent significatives. Elle révèlent le rôle important du niveau d'éducation formation, du phénomène d'urbanisation, du niveau de vie, de l'activité économique, des relations extérieures, des infrastructures de télécommunications, des équipements et des coûts d'accès ainsi que de l'offre dans le développement d'Internet en Afrique.


  1. La construction de modèles explicatifs


L'analyse précédente qui envisage les variables séparément a permis de dégager un certain nombre de liaisons importantes. Le souci de synthèse conduit à construire deux modèles explicatifs24. Bien que significatifs, les deux modèles proposés sont grevés d'une hypothèque qu'une analyse factorielle viendra lever.


a. Les deux modèles explicatifs

Pour la construction des modèles, les variables sur lesquelles l'influence des politiques incitatives ne peut se vérifier qu'à long terme ont été écartées, c'est le cas notamment de l'éducation formation ainsi que de la population dans le premier modèle. Un certain nombre de variables explicatives corrélées significativement n'ont pas été prises en compte : le nombre d'entreprises situées parmi les cinq cent premières d'Afrique, les investissements directs étrangers ainsi que la richesse nationale. Le commerce extérieur et particulièrement les importations leur a été préféré car en Afrique, l'usage d'Internet se révèle encore tributaire d'une demande solvable limitée dont la majeure part est vraisemblablement constituée d'agents exerçant une activité liée au commerce extérieur. L'équipement en ordinateurs a également été écarté car d'une part, la corrélation avec l'usage d'Internet apparaît trop évidente et, d'autre part, il apparaît à l'heure actuelle difficile de procéder à une distribution de PC en Afrique pour développer l'Internet, d'autant plus que cette démarche se heurterait inévitablement au défaut d'infrastructures de télécommunication. Enfin, l'offre constituée par le nombre de FSI et la largeur de bande internationale ont été ignorées, car il n'est pas certain que l'offre crée sa propre demande dans ce domaine. Les variables importantes sur lesquelles les politiques de développement nationales et internationales peuvent avoir une emprise à court-moyen terme concernent les infrastructures de télécommunication, le coût d'usage desdites infrastructures ainsi que le commerce extérieur.

Le premier modèle, significatif (F = 57,38) explique la densité de comptes Internet par la télédensité, le coût relatif des communications locales et les échanges extérieurs. Il met en évidence l'importance des infrastructures de communication avec la télédensité (élasticité = 1,18) et dans une moindre mesure (élasticité = 0,30) celle des relations extérieures25. Par contre, le coefficient de régression du coût horaire d'une communication locale rapportée au PNB par habitant ne présente pas le signe attendu. Le modèle explique 86 % de la variance de LNCI.



Variable expliquée : LNCI


valeur

Constante

t

-0,23


-0,58

valeur

Logarithme de la télédensité

t

1,18*


5,65

valeur

Logarithme (coût horaire d'une communication locale / PNB par habitant)

t

0,34**



2,24

valeur

Logarithme du montant des échanges de biens et services pour 100 habitants

t

0,30**



2,06

Nombre d'observations

33



0,86

F

57,38*


Dans le premier modèle, la variable expliquée est rapportée à la population, ce qui occulte d'une certaine manière la dimension démographique qui concourt à la taille du marché national. Dans un second modèle nous avons considéré le logarithme du nombre de comptes Internet par pays (LCI).

Caractéristiques de la variable LCI


N

Minimum

Maximum

Moyenne

Ecart-type

LCI

49

1,71

5,52

3,06

0,82


Le deuxième modèle significatif (F = 64,14) confirme les résultats du modèle précédent en mettant en lumière l'importance des infrastructures de communication, celle du commerce extérieur à travers les importations de biens et services et accessoirement du coût des communications qui comme précédemment ne possède pas le signe attendu. Par contre, le modèle révèle l'importance de la population de chaque pays comme facteur de dimension, représentatif de la taille du marché national dans une Afrique fragmentée.


Variable expliquée : logarithme du nombre de comptes Internet par pays LCI


valeur

Constante

t

-3,05*


-4,33

valeur

Logarithme de la télédensité

t

1,06*


5,40

valeur

Logarithme de la population

t

1,19*


11,21

valeur

Logarithme des importations de biens et services pour 100 habitants

t

0,55*



3,30

valeur

Logarithme du coût horaire d'une communication locale / PNB par habitant

t

0,35**



2,50

Nombre d'observations

33



0,90

F

64,14*


Au total, les deux modèles parviennent à expliquer environ 90 pour cent de la variance du nombre de comptes Internet. Ils mettent tous deux en lumière l'importance des infrastructures de télécommunication dont le développement constitue le souci majeur des principaux acteurs de la coopération internationale. Il convient de noter que l'accroissement de la valeur explicative des modèles nécessiterait peut être l'intégration d'une nouvelle variable, il pourrait s'agir d'une variable économique non prise en compte26, ou bien d'une variable « sociale » du type âge ou langue d'expression27. Malgré tout, les deux modèles envisagés sont grevés d'une hypothèque commune : l'élasticité positive du coût horaire d'une communication locale rapportée au PNB par habitant. En fait, il apparaît peu probable que l'augmentation du coût relatif des communications locales induise un accroissement de l'usage d'Internet même si ladite majoration de prix se traduit par une amélioration de la qualité des télécommunications. Pour tenter de lever cette hypothèque, il a été procédé à une analyse factorielle en composantes principales.


  1. La levée des hypothèques

Pour l'analyse factorielle, les variables significatives contenues dans les modèles précédents ont été reprises. Il leur a été ajouté des variables complémentaires telles la population urbaine totale, le PNB par habitant ainsi que le niveau d'éducation. En effet, la population urbaine totale apparaît intéressante en ce sens que les villes concentrent la majeure part des lignes téléphoniques, vecteur privilégié de l'accès à Internet. Le PIB par habitant, indicateur de l'activité économique et du revenu, apporte un supplément d'information à la télédensité ainsi qu'aux échanges extérieurs. De plus, le niveau d'éducation a été inclus dans l'analyse factorielle en raison de l'importance de l'élasticité de l'utilisation d'Internet à ce facteur (2,30). Enfin, la variable comptes Internet (LCI) a été exclue de l'étude dans un premier temps, afin de mettre en lumière la structure existante relative à l'ensemble des variables envisagées.

Deux composantes principales se dégagent. La première composante F128, apparaît principalement déterminée par le PIB par habitant, le commerce extérieur ainsi que par la télédensité et le coût des télécommunications. Le coût des télécommunications se positionne dans le quadrant sud-ouest près de l'axe F1 à cause de la forte corrélation négative (r = -0,8) qui lie cette variable à la télédensité. Cette position lève l'hypothèque qui pèse sur les deux modèles analysés précédemment, qui enregistrent une élasticité faible mais positive d'Internet au coût des télécommunications. La deuxième composante F229 est fortement conditionnée par la population urbaine ainsi que la population totale. F1 représente en quelque sorte le niveau de développement caractérisé par le PIB par habitant, l'ouverture sur l'extérieur ainsi que le niveau d'éducation. Ce niveau de développement se traduit également en termes d'infrastructures de télécommunication dont le développement a pour conséquence une réduction des coûts. F2 fait essentiellement référence à la taille du marché national et plus particulièrement du marché urbain (voir le deuxième modèle).


Corrélation entre variables et facteurs


Facteurs

variables

F1

F2

Log des échanges extérieurs pour 100 habitants

0,95

-4,31E-02

Log du PIB par habitant en PPA

0,94

-1,56E-02

Log de la télédensité

0,94

0,13

Log du niveau d'éducation

0,70

0,34

Log de la population urbaine totale

- 0,13

0,96

Log de la population totale

- 0,39

0,89

Log du coût d'une communication locale / PNB par hab

- 0,80

-0,21


Dans un deuxième temps, le logarithme du nombre de comptes Internet par pays (LCI) a été introduit dans l'analyse factorielle. Cette introduction n'apporte pas de modifications notables à la structure précédente. On note une légère rotation de l'ensemble dans le sens des aiguilles d'une montre. De ce fait, le premier facteur F'130 met encore plus l'accent sur les infrastructures de télécommunication et les coûts attachés à leur utilisation. Le second facteur F'231 reste toujours fortement déterminé par la taille de la population nationale. LCI présente une corrélation quasi-identique avec les deux facteurs principaux. L'utilisation d'Internet apparaît liée au niveau de développement des infrastructures de télécommunication ainsi qu'au niveau de développement global du pays caractérisé par son PIB par habitant et ses échanges extérieurs et accessoirement son niveau d'éducation32. La diffusion d'Internet est également liée à la taille du marché représentée par l'importance de la population urbaine et de la population totale du pays. Toutefois, Internet se présente comme un élément venant simplement s'insérer dans un cadre préexistant puisque l'introduction de la variable LCI n'entraîne aucune modification notable de la structure des données de l'analyse factorielle.

Corrélation entre variables et facteurs


Facteurs

variables

F'1

F'2

LCI

0,69

0,65

Log des échanges extérieurs pour 100 habitants

0,92

- 0,24

Log du PIB par habitant en PPA

0,92

- 0,21

Log de la télédensité

0,96

- 4,68E-02

Log du niveau d'éducation

0,75

0,18

Log de la population urbaine totale

6,48E-02

0,95

Log de la population totale

- 0,19

0,96

Log du coût d'une communication locale / PNB par hab

- 0,81

- 4,26E-03


En définitive, il semble qu'Internet ne soit pas, à l'heure actuelle, le facteur majeur de développement escompté en Afrique. Cet état de fait peut être simplement dû à la relative faiblesse de la pénétration de l'Internet sur le continent. On peut penser qu'au fur et à mesure de sa dissémination, cette technologie pourra se révéler en mesure de produire des effets positifs sur le processus global de développement.


  1. Le modèle final

La régression de LCI sur les deux facteurs F1 et F2 se révèle significative au seuil de un pour cent. 78 pour cent de la variance de LCI est expliquée par ces deux facteurs. Comme signalé précédemment, il semble que la diffusion d'Internet en Afrique soit également conditionnée par d'autres paramètres non pris en compte dans cette analyse. Il convient de noter que la valeur de l'élasticité au facteur F1 (0,41) est inférieure à celle enregistrée pour le facteur F2 (0,57). Ce résultat pourrait signifier que l'usage d'Internet est légèrement plus sensible à la dimension du marché qu'aux infrastructures de communication. Toutefois les politiques visant exclusivement le développement des infrastructures de communication restent justifiées parce que l'élargissement du marché s'avère plus complexe car il requiert la mise en ½uvre d'un faisceau de politiques appropriées, combinées surtout en Afrique, à un environnement externe favorable.



Variable expliquée : LCI


valeur

Constante

t

3,30*


49,20

valeur

F1

t

0,41*


6,06

valeur

F2

t

0,57*


8,42

Nombre d'observations

33



0,78

F

53,84*


Ce modèle montre que la diffusion d'Internet en Afrique est principalement déterminée par deux facteurs explicatifs. Le premier fait référence au niveau de développement du pays. En effet, la diffusion d'Internet apparaît fortement tributaire du niveau de développement des infrastructures de télécommunication qui est lui même fortement corrélé avec le niveau de développement du pays appréhendé à travers le PIB par habitant, les échanges extérieurs rapportés à la population et le niveau d'éducation. Etant donné le développement récent d'Internet en Afrique, il est possible d'affirmer que la diffusion de cette technologie est conditionnée par le niveau de développement du pays et non l'inverse. Le second facteur explicatif met en lumière la dimension du marché à travers la population totale et la population urbaine totale. La diffusion rapide d'Internet nécessite une demande solvable qui atteigne un volume suffisant pour susciter l'apparition d'une offre susceptible de la satisfaire.


II. La diffusion d'Internet et le développement de l'Afrique : enjeux et problèmes

La présente étude a identifié un certain nombre de déterminants de la diffusion d'Internet en Afrique. Les politiques de développement, internationales ou nationales, dans ce domaine focalisent sur un ou plusieurs de ces principaux déterminants. Dans un contexte marqué par de nombreuses carences, il est à craindre que la promotion d'Internet en Afrique se heurte à des obstacles d'ordre économique, politique ou social.


  1. Les enseignements

Quatre principaux domaines complémentaires exerçant une influence sur l'usage d'Internet ont été mis en évidence : les infrastructures de télécommunication, le capital humain, la demande solvable ainsi que les équipements informatique.

Les infrastructures constituent l'élément clé mis en lumière par notre étude. Appréhendées à travers la télédensité, elles représentent une variable majeure des modèles construits. Bien entendu, la télédensité ne synthétise pas l'ensemble des données afférentes aux infrastructures. Elle ne rend pas notamment compte de la qualité des télécommunications et pourrait, dans un avenir proche, perdre encore de sa valeur explicative avec le développement des technologies Internet sans fil. Néanmoins, la télédensité reste l'indicateur quantitatif le plus couramment utilisé par l'ensemble des acteurs du développement d'Internet. De plus, il est à noter que l'accroissement de la télédensité se traduit généralement par une diminution des coûts des télécommunications (corrélation inverse forte entre les deux variables), ce qui devrait renforcer l'usage d'Internet.

Le capital humain se définit généralement comme l'ensemble des qualifications, des aptitudes et des connaissances dont bénéficie l'homme et qui améliorent ses revenus monétaires et psychiques futurs33. Son rôle décisif est perceptible à travers les valeurs élevées des élasticités des comptes Internet aux différentes variables mesurant le niveau d'éducation formation. L'accumulation de capital humain présente un double intérêt. D'une part, elle permet d'élargir le nombre d'utilisateurs potentiels d'Internet. D'autre part, elle peut autoriser la maîtrise et l'appropriation technologique par les autochtones.

La demande solvable a été appréhendée à travers de nombreuses variables. Il ressort de l'étude qu'elle s'exprime principalement en milieu urbain. Elle émane, pour une large part, des groupes à haut revenu ainsi que des entreprises et elle apparaît fortement liée aux échanges extérieurs, notamment aux importations.

Les équipements informatique ont une importance majeure. Cette assertion, communément admise, est vérifiée par une élasticité de 0,95 entre la densité de comptes Internet et la densité de PC et un coefficient de détermination de 0,61.

Ces quatre domaines majeurs pour l'usage d'Internet apparaissent complémentaires. Leur croissance devrait s'opérer de concert pour un développement harmonieux du réseau des réseaux en Afrique. Le problème qui se pose est que la croissance de chacun de ces domaines possède un échelonnement différencié dans le temps. Par exemple, l'accumulation du capital humain représente un investissement à moyen long terme, tandis que le développement des infrastructures peut s'opérer à un horizon plus rapproché. Enfin, le développement d'Internet est soumis à d'autres types de contraintes portant sur les variables mises à jour.


  1. Les problèmes posés par le développement de l'usage d'Internet

Ces problèmes ont principalement trait aux infrastructures et équipements ainsi qu'à la dimension du marché.

Concernant les infrastructures de télécommunication, l'Afrique présente de nombreuses carences dans ce domaine tant en quantité qu'en qualité. Toutefois pour certains, cette situation peut être exploitée pour emprunter un « raccourci technologique ». En effet, « les pays africains ne sont pas encombrés par des réseaux extensifs construits sur la base de technologies obsolètes, qui nécessiteraient un processus de remplacement progressif. L'inertie technologique s'avère donc relativement faible. Dans le domaine technologique, l'ampleur du bond en avant est en raison inverse de l'inertie technologique véhiculée. L'objectif étant de maximiser l'ampleur du bond, la technologie la plus évoluée devra être utilisée pour réaliser les nouvelles infrastructures34. Les pays africains pourront ainsi brûler plusieurs étapes et gagner plusieurs décennies dans le processus de développement des technologies de l'information. En agissant ainsi, ils profiteront de l'expérience des pays plus avancés pour déterminer les voies et moyens de maximiser les bénéfices sociaux adressés à une large frange de la population, tout en évitant les effets pervers35 » [PANOS, 1998]. A ce propos, on doit se remettre en mémoire le débat, vieux de deux décennies, autour du saut technologique que pouvait engendrer la révolution informatique pour les pays du Sud. L'histoire a montré combien cet espoir avait été déçu.

Néanmoins, le développement des infrastructures de communication en Afrique fait l'objet d'un large consensus, mais il pose un certain nombre de problèmes.

Le premier concerne le coût élevé des infrastructures. L'Union internationale des télécommunications (UIT) a estimé qu'il faudrait au moins 50 milliards de dollars pour parvenir à une télédensité de 5% , soit 5 lignes téléphoniques pour 100 habitants en Afrique subsaharienne36 [ITU 1998a]. Ces coûts seront encore plus élevés si l'objectif d'un « accès universel au réseau37 » proposé par certaines organisations internationales et ONG, est retenu, sachant que 80 % de la population africaine se situe en zone rurale. Et ce, même si l'on organise un partage des ressources au sein de centres d'information communautaires à vocation multiples (télécentres).

Le second problème est celui du financement qui peut s'opérer sur la base de ressources publiques locales, d'aide internationale, d'investissement étranger ou d'autofinancement à partir de la création d'activités économiquement profitables. Il est évident que la réalisation d'investissements massifs dépasse la capacité de financement public d'Etats africains le plus souvent exsangues et sous le joug des institutions de Bretton Woods. Conscients de cette situation et pour éviter la marginalisation du continent, les acteurs de la coopération internationale ont mis en ½uvre un certain nombre de projets (initiative Leland de l'USAID, projet ACACIA du Canada, projet RIO de la France, programme Infodev de la Banque Mondiale?). Malgré tout, ces projets additionnés sont loin d'atteindre le volume financier critique susceptible d'assurer le décollage d'Internet. De plus, l'une des contreparties de l'aide internationale est la libéralisation du secteur des télécommunications dans les pays bénéficiaires38. Cette libéralisation est censée inciter l'investissement privé qui devrait assurer la majeure part du financement des infrastructures. Déjà, dans le cadre de processus de privatisation, les firmes multinationales des pays du Nord se sont taillé de larges parts de marché en Afrique39. « Pour la plus grande part, les ventes d'opérateurs nationaux de télécommunications ont été réalisées au profit d'investisseurs étrangers40 » [ITU 1998b, p.2]. En effet, « sous la pression de la déréglementation sectorielle et des innovations technologiques, les opérateurs nationaux des PVD se voient contraints à l'abandon du monopole dans un contexte mono produit (le téléphone) et mis en demeure d'affronter la concurrence dans un univers multiservices. De fait, le prix à payer pour le développement des services à forte valeur ajoutée passe par l'intégration de ces secteurs nationaux dans le giron des grands opérateurs internationaux »[D. Desbois, 2000, p.143]. Cette intégration, qui prend le plus souvent la forme de joint-ventures, se trouve facilitée en Afrique par le souci des élites de conserver le bénéfice d'une partie de la rente menacée par la privatisation du secteur public. En fait, dans bien des cas, on s'aperçoit que la résultante du processus de privatisation a été la substitution d'un quasi-monopole privé à un monopole public. Les conséquences se mesurent en termes de faiblesse de l'investissement pour développer le marché, de barrières à l'entrée du marché pour les éventuels concurrents et de profits élevés. D'ailleurs, il semble que, contrairement aux prévisions des tenants de la pensée économique dominante41, la privatisation des opérateurs publics de télécommunication et la libéralisation de ce secteur n'ont pas entraîné une baisse suffisante des coûts d'accès à Internet42. De plus, les barrières à l'entrée du marché dressées par le quasi-monopole privé empêchent le développement d'activités rentables susceptibles d'autofinancer le développement d'Internet43.

Le troisième problème est celui de la maîtrise de la technologie. Vue d'Afrique, la technologie adoptée apparaît totalement « off-shore ». Les africains ne la maîtrisent pas en ce sens qu'ils restent étrangers à toutes les étapes allant de la conception à la production de la technologie. Se pose également le problème de la maintenance. En fait, l'Afrique reste en position de simple consommateur vis à vis des TIC. Le même type d'analyse peut être faite pour ce qui est des équipements nécessaires à l'accès au réseau (ordinateur, modem?) car « la généralisation de l'utilisation d'Internet reste malgré tout limitée en raison de l'insuffisance de l'informatisation » [Mike Jensen, 1998a p.3].

Le développement d'Internet suppose aussi l'existence d'une demande solvable. Nous avons vu que celle-ci est notamment fortement déterminée par le revenu découlant de l'activité économique. Actuellement, la demande solvable est relativement faible, elle apparaît fortement corrélée au commerce extérieur. Les échanges extérieurs nécessitent l'établissement de contacts avec des clients ou fournisseurs étrangers et en ce sens ils suscitent le développement d'Internet. Mais, le développement d'Internet peut à son tour susciter un développement du commerce extérieur et permettre à l'Afrique de participer activement à l'économie mondiale. Le courrier électronique, la mise en ligne de produits locaux? peuvent développer le commerce à travers le réseau mondial. La Banque mondiale cite les exemples du café et des produits de l'artisanat [Banque Mondiale SD, p.19]. En fait, la question qui se pose n'est pas l'utilisation des TIC pour exporter mieux, mais plutôt que peut-on exporter ? Il est évident que le développement des TIC en Afrique ne suscitera pas le développement, tant que le continent continuera d'exporter des matières premières et des produits issus de l'agriculture de rente. Ce développement tant attendu implique une modification de la spécialisation internationale du continent. Peut-elle avoir lieu dans un contexte ultra-libéral ? La demande est également déterminée par la taille de la population. Or, l'Afrique est morcelée et l'intégration régionale se présente comme une nécessité. Les TIC peuvent être utilisées pour renforcer l'intégration régionale notamment par le développement des échanges d'informations. Un certain nombre d'initiatives ont déjà été prises au niveau régional comme au sein de la SADC et du COMESA dans le cadre du projet de « société de l'information en Afrique » (AISI) coordonné par la Commission économique pour l'Afrique (CEA). L'analyse factorielle a mis en évidence l'importance de la taille du marché. Ce qui semble indiquer que les politiques de développement des infrastructures de télécommunication ne peuvent être mises en oeuvre de façon autonome sans référence à la demande. Dans le cas contraire, ces politiques seraient susceptibles d'aboutir à la réalisation de nouveaux « éléphants blancs ». En définitive, il apparaît que le développement d'Internet ne peut être dissocié du développement global du continent africain.


Conclusion

Quel peut être l'apport de l'utilisation des technologies de la communication, et en particulier d'Internet, au développement humain de l'Afrique ? Dans un contexte de mondialisation et d'émergence de la société de l'information, l'Internet sera-t-il un nouvel instrument de discrimination et de marginalisation, ou bien au contraire un outil au service d'un développement harmonieux et durable du continent ? Le discours sur l'apport d'Internet au développement oscille entre deux extrêmes ; l'un alarmiste considère Internet comme un instrument majeur du néolibéralisme porteur d'une nouvelle forme d'impérialisme principalement américain ; l'autre, lénifiant, voit dans cette technologie un vecteur de progrès, d'égalité, d'émancipation et de bien-être pour les populations défavorisées.

Il est vrai qu'Internet est un puissant outil de communication qui facilite l'échange et la diffusion d'une information abondante, actualisée en permanence et pertinente pour le développement des pays du Sud. Les applications dans le domaine de l'économie, de l'enseignement, de la formation, de la santé, de la gouvernance et de la démocratie peuvent s'avérer nombreuses et variées [cf. World Bank, 1995]. En ce sens, Internet peut contribuer au développement humain.

Néanmoins, un certain nombre de zones d'ombre subsistent. Internet n'est qu'un outil technique et en cela, il ne peut résoudre à lui seul les problèmes liés au développement de l'Afrique. A ce propos, on se souviendra des effets très nuancés de la « révolution verte » censée pallier les réformes agraires et la redistribution des terres. En fait, c'est la nature de ses usages qui conditionnera l'apport d'Internet au développement. Sans oublier que la production ainsi que le stock d'information scientifique et technique se situent pour l'essentiel dans les pays du Nord qui en sont les propriétaires. L'accès aux ressources d'information aura nécessairement un coût pour le Sud caractérisé par la pauvreté. Ce n'est que l'appropriation de la technologie par les populations et le développement de contenus autorisant l'échange notamment avec le Nord qui peuvent se révéler en mesure de faire d'Internet un outil de développement.

Internet se diffuse en Afrique porté par un certain nombre de déterminants que nous avons mis à jour. Par ce biais, le continent va sans doute entrer dans la société mondiale de l'information qui produit ses propres contradictions en véhiculant des progrès et des risques.

L'Internet représente peut être un chance pour le développement de l'Afrique. Néanmoins, même si l'usage d'Internet engendre les effets positifs attendus, le développement de l'Afrique restera un espoir vain tant que le continent sera cantonné dans une spécialisation appauvrissante entretenue par les programmes d'ajustement structurel menés sous l'égide des institutions de Bretton Woods.


Glossaire

L'analyse en composantes principales (ACP) : à partir de k variables observées sur n individus, l'ACP permet de rechercher un petit nombre de nouvelles variables appelées composantes principales résumant aussi fidèlement que possible les données de départ.

L'élasticité est le rapport des variations relatives simultanées de deux grandeurs liées par une relation de causalité réciproque. Elasticité de y par rapport à x :

Le coefficient de détermination R² mesure l'intensité de la liaison (linéaire) entre deux ou plusieurs variables. Dans le cas de deux variables X et Y :

R² exprime la proportion de la variance totale expliquée par la régression.

La régression multiple permet d'étudier la liaison linéaire entre une variable dépendante (expliquée) Y et un ensemble de variables indépendantes (explicatives) x1, x2,?, xi,?, xk. Le modèle est le suivant :

a1,a2,?, ai,?, ak sont les coefficients de régression, b la constante et e représente les résidus.

On effectue des tests sur la signification des coefficients de régression, de la constante et de la liaison globale. Significatif au seuil de 1% indique que si l'on prend un risque de 1%, il est possible de retenir l'hypothèse qui sous-tend le calcul des éléments précités.

La variance est la moyenne arithmétique des carrés des écarts des n observations xi à leur moyenne arithmétique :


Données statistiques :

Nombre de comptes Internet par pays en mai 1999, [Jensen Mike, 1999a]
Nombre de fournisseurs de services Internet par pays (FSI) en mai 1999, [Jensen Mike, 1999a]
Télédensité (nombre de lignes téléphoniques fixes pour cent habitants) en 1998, [Jensen Mike, 1999a]
Bande passante internationale en Kbps en mai 1999, [Jensen Mike, 1999a]
Coût d'une communication téléphonique locale en dollar US par heure en mai 1999, [Jensen Mike, 1999a]
Population en 1998, [Jensen Mike, 1999a]
Coût annuel de 5 heures d'accès à Internet par mois en dollars US, 1998, [Jensen Mike, 1998a]
Taux d'alphabétisation des adultes en 1997 [PNUD, 1999]
Indicateur de niveau d'éducation en 1997 [PNUD, 1999]
Taux net de scolarisation secondaire (en pourcentage du groupe d'âge concerné) en 1997 [PNUD, 1999]
PIB réel par habitant (PPA) en 1997, [PNUD, 1999]
PIB réel par habitant (PPA) des 20% les plus riches (1980-1994), [PNUD, 1999]
Population urbaine en 1997, [Banque mondiale, 1999]
PNB par habitant en 1997 (dollars US), [Banque mondiale, 1999]
Exportations et importations de biens et services en 1997, (millions de dollars US) [Banque mondiale, 2000]
Investissements directs étrangers (IDE) de 1996 en millions de dollars US, [Banque mondiale, 1999].

Nombre d'étudiants dans l'enseignement supérieur (diverses années) [UNESCO, SD]

Classement des 500 premières entreprises africaines par le chiffre d'affaires en 1998, [JAE, 1999].
Nombre d'ordinateurs personnels (PC) en 1998, [ITU, 2000]



Bibliographie sommaire :


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1 Cette statistique exclut l'Afrique du Sud dont la situation se distingue nettement de celle du reste du continent.. De plus, ce chiffre ne tient compte que du nombre d'ordinateurs connectés, sachant qu'un même ordinateur peut abriter plusieurs abonnements et qu'un même abonnement peut être utilisé par plusieurs personnes. Site de l'IICD : < http://www.iicd.org/ >.

2 L'Afrique du Sud concentre à elle seule 57 % des comptes Internet.

3 On peut citer à ce propos un certain nombre d'initiatives : le projet RIO de l'IRD, le projet canadien ACACIA , le projet REFER de l'AUPELF, l'initiative Leland de l'USAID? et de nombreux projets de moindre ampleur initiés par des ONG.

4 Les estimations du nombre d'utilisateurs actifs de l'Internet varient fortement selon les organismes évaluateurs : en mars 1999, l'OTEC évaluait le nombre d'utilisateurs en Allemagne à 8,4 millions tandis que IDC Research en trouvait 12,9 millions à la même période soit 53,5 % de plus. De même, en octobre 1998, Multiscope évaluait le nombre d'utilisateurs belges à 0,4 million tandis qu'Initiative Média avançait le nombre de 1,12 millions [Elie Michel, 2000]. On peut penser que les estimations concernant l'Afrique sont au moins aussi imprécises.

5 Cette étude portait principalement sur l'Ethiopie, le Sénégal, l'Ouganda et la Zambie.

6 L'indicateur de niveau d'éducation du PNUD est composé pour deux tiers du taux d'alphabétisation des adultes et pour un tiers du taux brut de scolarisation tous niveaux confondus. Cet indicateur est une composante de l'indicateur du développement humain IDH.

7 La même notation sera conservée tout au long du papier.

8 Une régression du nombre d'hôtes Internet en 1995, avec le PNB de 35 pays africains donne une relation significative avec un R² de 0,76 [World Bank, SD, p.66].

9 Etant donnée la disponibilité des données statistiques sur le PIB réel par habitant des 20% les plus riches de la population.

10 En 1997, pour l'Afrique subsaharienne : importations de biens et services : 106,4 milliards de dollars ; exportations : 100,8 milliards [Banque mondiale, 2000, p. 287] .

11 L'Afrique dans son ensemble n'a pas bénéficié de cet accroissement des IDE.

12 L'observation relative au Gabon a été ignorée car le montant des IDE était négatif.

13 Voir les initiatives extérieures portant notamment sur le développement du partage de l'Internet notamment à travers les télécentres.

14 « 195 millions de dollars, c'est le chiffre d'affaires que les entreprises sud-africaines ont réalisé en 1998 sur le Web. C'est, du moins, l'estimation de la société Acuity Media Africa spécialisée dans le marketing sur Internet. Ce qui représente une croissance de 140% par rapport à l'année précédente. Le décollage ne fait que commencer. Selon Arthur Goldstuck, directeur d'Acuity Media Africa, une nouvelle progression de 125% sera enregistrée cette année. Environ 600 sociétés sud-africaines proposent une offre commerciale sur le Net » [MFI/RFI, 17/12/99].

15 Nous ne présentons sous forme de tableau que les résultats de la deuxième régression. Les résultats de la première sont les suivants : constante : - 1,49* (t=-18,63), coefficient de régression : 0,89* (7,97), R² : 0,58 et F : 63,48*, N = 49.

16 « Outre le prix des équipements et l'accès au réseau téléphonique, le prix des communications est un obstacle au développement du réseau des réseaux. Si la facture moyenne pour une minute de communication est de 2,7 dollars pour une heure de surf, il existe de fortes disparités entre les Etats. Ainsi, le surfeur égyptien ne paiera que 1,6 dollar de l'heure, là où l'Ivoirien déboursera 4,8 dollars. Et le Mauritanien 6,60 dollars » [MFI/RFI].

17 « For instance, the percentage of costs for local internet access that go towards telephone charges and ISP charges is 58 percent of the total user cost. For a user who accesses an ISP from outside a local calling area, telephone and ISP charges skyrocket to 86 percent of total user cost », [World Bank, SD, p. 4].

18 Une première régression entre LNCI et le logarithme du coût horaire d'une communication locale, donnait une relation inverse mais non significative entre les deux variables.

19 L'élasticité (0,95) bien que proche de l'unité, révèle que la totalité des ordinateurs installés ne sont pas connectés au réseau.

20 Traduction de l'auteur. Voir aussi : [ITU, 1997a].

21 Télédensité : nombre de lignes téléphoniques pour 100 habitants.

22 Pour un inventaire de ces projets, on peut consulter [Jensen Mike, < http://www3.sn.apc.org/ >].

23 « There is evidence to suggest that competition in the ISP (FSI) market has sharply affected the level of prices and degree of Internet penetration » [ITU, 1999b].

24 La méthode « pas à pas » a été utilisée. Les variables sont séquentiellement introduites ou éliminées de la fonction discriminante suivant les critères spécifiés (critère de probabilité de F pour l'introduction : < ou = à 0,05 ; critère de probabilité de F pour l'élimination : > ou = à 0,1). Le processus s'arrête lorsque aucune variable ne peut être introduite ou éliminée.

25 Il est possible de remplacer la variable échanges extérieurs de biens et services par la variable importations de biens et services. Dans ce cas, la régression accroît sa signification (F = 63,2), le coefficient de régression de la variable introduite augmente 0,41** (2,67), ce qui tend à confirmer que les importations sont un élément incitatif d'usage d'Internet plus important que les exportations. Enfin, le R² prend la valeur 0,87.

26 Il peut aussi s'agir d'une variable prise en compte mais pour laquelle nous n'avons pas un nombre suffisant d'observations.

27 Il est évident que le langage de la toile mondiale est l'anglais, en ce sens les pays francophones d'Afrique ont à faire face à un handicap. « Près de 80% des sites web et les interfaces utilisateurs (graphismes et instructions) sont exclusivement en anglais, alors que moins d'une personne sur dix maîtrise cette langue dans le monde », [PNUD, 1999, p.62].

28 F1 représente 56,62% de la variance totale.

29 F2 représente 29,78% de la variance totale.

30 F'1 représente 54,07% de la variance totale.

31 F'2 représente 29,78% de la variance totale.

32 « Trois indicateurs liés au savoir sont en corrélation étroite avec le taux de croissance (de l'économie) : il s'agit de l'éducation, de l'ouverture au commerce et de l'importance des infrastructures de communications (mesurée par la télédensité). Ces trois indicateurs? montrent qu'un pays peut dynamiser sa croissance en relevant le niveau d'instruction de sa population, en s'ouvrant au commerce et en développent ses infrastructures de communications. Ce gain pourrait être de quatre points de pourcentage dans un pays qui, situé très en deçà de la moyenne, passerait nettement au-dessus pour chacun de ces indicateurs », [World Bank, 1999, p. 25].

33 G.S. Becker., Human Capital, N.B.R New York, Columbia University Press, 1964.

34 « De plus, quelques pays en développement voient là une occasion - que certains d'entre eux ont déjà mise à profit - de devancer les pays industriels en passant directement de réseaux filiaires sous-développés à des réseaux intégralement numérisés, sautant l'étape de la téléphonie analogique traditionnelle qui constitue encore l'ossature du système dans la plupart des pays industriels », [World Bank, 1999, p. 65].

35 Traduction de l'auteur.

36 Dans la zone OCDE, la télédensité est de 52,3.

37 Cet accès universel est perçu comme une condition essentielle du développement socio-économique.

38 Le programme Infodev de la Banque Mondiale se fixe comme objectif premier la création d'un environnement favorable au marché dans lequel la responsabilité première en matière d'investissement et de fourniture de services appartient au secteur privé.

39 C'est notamment le cas de France Télécom en Côte d'Ivoire et au Sénégal.

40 Traduction de l'auteur.

41 « A mesure que le marché d'Internet se libéralise? les prix devraient baisser, rendant plus abordable l'accès et incitant à la création de nouveaux services pour les africains » [ITU 1998b, p.14].

42 C'est ce que déplorait un fournisseur de services Internet installé au Sénégal, lors de la 21ème université d'été de la communication, Hourtin, août 2000.

43 Idem

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