Les nouveaux d?fis de la micro-informatique Marc Humbert*
La micro-informatique est entrée dans nos moeurs et chacun connaît ses principales caractéristiques. Nous prenons le parti de la considérer comme un service fourni à un utilisateur, service qui transforme l'utilisateur en "micropholiste". Le "micropholiste" accède à la manipulation électronique de données, c'est à dire à leur traitement à partir d'une décomposition en chiffres binaires ("bits"), ce qui revient à écrire (ou former ?) toute information dans une sorte d' alpha-bit qui constitue le code de base de cette nouvelle alphabétisation (Humbert, 1987) que les anglo-Saxons appellent "computer literacy". Le traitement des données concerne non seulement les nombres, mais aussi les lettres, les textes, les images... ; le "micropholiste" en quelque sorte parle une langue spécifique et aspire à communiquer dans cette langue avec ses semblables. De fait, le traitement des données est aussi télé-échange - sous diverses formes possibles - et permet même aujourd'hui de se promener sur des réseaux ; celui qui émet des phonèmes en alphabits bénéficie ainsi d'une réelle capacité de déplacement comme celle de l'automobiliste, mais l'engin qui lui permet tout cela est micro. Il utilise une "plateforme", un équipement matériel et immatériel d'encombrement et de prix réduits. Le service micro-informatique est alors rendu par un ensemble <machine-système de commande logique>, couple "hard/soft" en anglais sur lequel règne le micropholiste.
La machine est un objet-complexe constitué d'éléments compatibles, eux-mêmes constitués de pièces et de composants, ce qui fait de l'industrie correspondante une industrie d'assemblage avec certains producteurs intégrés, d'autres qui ne le sont pas. La machine est constituée d'un objet-central appelé micro-ordinateur (1), qui comprend des composants micro-électroniques de base, un clavier et un écran : le tout est même intégré en un seul objet (qui peut comporter en sus un pointeur) dans les micro-ordinateurs portables ; mais aussi bien pour ceux-ci que dans le cas général des micro-ordinateurs de bureau se situant dans la moyenne, l'imprimante et, de plus en plus, le raccordement à un réseau et l'accès à un scanner semblent indispensables pour apprécier pleinement le service rendu. Celui-ci n'est toutefois accessible que par le secours de ces éléments immatériels que sont les systèmes de commandes appelés logiciels. Quatre catégories de logiciels peuvent être distingués : les logiciels d'exploitation qui permettent d'émuler les fonctionalités de la machine, les logiciels de programmation qui permettent de lui faire effectuer des manipulations complexes à partir de son fonctionnement de base, les logiciels de communication qui permettent de faire dialoguer l'objet central avec des périphériques et plus largement avec toutes sortes d'autres machines, enfin des logiciels d'application qui sont des programmes préparés à l'avance pour réaliser des manipulations très complexes.
L'émergence de la micro-informatique est somme toute récente : elle n'entre pas dans la conversation courante avant le milieu des années quatre-vingt et s'installe alors à la suite d'un bouleversement de ce qui était la "grande" informatique ; en fait on ne peut parler d'installation : se maintenir dans cette industrie tient du défi permanent, car elle est le siège d'une compétition incessante et acharnée. Cependant cette compétition contribue tout d'abord à renforcer le concept de micro-ordinateur individuel. Aujourd'hui les enjeux de la compétition amènent de nouveaux défis et le véritable avènement du "micropholiste".

Petite histoire d'un bouleversement

La luxuriante bouture micro-informatique

Les possibilités de vitesse de calcul paraissent infinies dès la fin des années cinquante, grâce à l'introduction de machines électroniques et d'un procédé dénommé en français informatique à partir de 1965 (terme forgé par J. Lesourne). Ce procédé est cependant extrêmement coûteux, réalisé avec des machines encombrantes exigeant des salles climatisées et une noria d'opérateurs. Mais l'évolution de l'informatique va s'inscrire dans un trend de réduction de la taille des machines et de l'extension simultanée des manipulations dont elles sont capables. La micro-informatique naît comme une bouture (ou un rebootage) de l'évolution des technologies de l'information. C'est même une explosion qui s'annonce avec le microprocesseur d'Intel sorti en 1971. Cette fois, sur une seule pastille de silicium, une puce, se trouve intégrée une unité de manipulation numérique : autour de ce microprocesseur, quelques connexions avec des circuits intégrés permettent de réaliser un véritable calculateur électronique en tout point modèle réduit des plus grands ; la micro-informatique est possible. L'encadré n°1 nous donne quelques dates de repère des éléments qui ont marqué l'évolution de cette industrie.
Encadré n° 1 : Quelques dates repères de la micro-informatique
1971 Hoff microprocesseur 4004 Intel, "la micro-informatique" en kit.
1973 R2E : Micral, le premier micro-ordinateur.
1974 470 V/6 d'Amdhal, la "compatiblité" (IBM) dans la grande informatique.
1975 MITS d'Altair, émergence de la micro-informatique ; et CP/M de Digital Research.
1976/77 Naissance de Microsoft, d'Apple et d'Oracle.
1978/79 Apple II ; Visicalc, le premier tableur.
1980 Rachat de DOS (clone de CP/M) par Microsoft.
1981 IBM : le PC XT avec Microsoft et Intel ; Wordstar ; DBase II (Ashton Tate) et Flight Simulator, logiciels leaders;
1982 Compaq, premier compatible PC IBM ; naissance de Sun, de Silicon graphics ; développement des stations de travail.
1983 IBM acquiert 20% du capital d'INTEL ; Lotus 1.2.3 devient le tableur leader.
1984 Apple MacIntosh avec souris ; PC AT ; naissance de CISCO.
1985 SPARC, le processeur RISC de Sun.
1986 1ère station de travail IBM RT-PC.
1987 IBM : PS/2 et OS2 ; Microsoft Windows 2.0.
1989/90 Microsoft Windows 3.0 . Tentative ACE d'un standard d'accord nouveau logiciel et machine.
1991 Accord IBM-Apple (sur Power PC) sera étendu à Motorola.
1992 Power Note Book d'Apple fabriqué par Sony.
1994 DOS 6.2 ; naissance de Netscape et de Navigator, logiciel de navigation sur Internet.
1995 Windows 95 de Microsoft ; Java de Sun.
1997 Le Pentium d'Intel travaille à 233 MHz.
Dès le milieu des années soixante-dix, deux changements importants sont à noter dans l'industrie informatique. Tout d'abord en 1974, l'ordinateur 470V6 d'Amdhal invente la "compatibilité". Pour la première fois, un constructeur d'ordinateurs ne fait pas fonctionner sa machine sur son propre système d'exploitation, mais copie, reproduit le même type de fonctionnement que celui des ordinateurs du premier constructeur, IBM, et fait évoluer ses machines en parallèle à celles de ce leader. Ensuite, en 1975, des micro-ordinateurs presque prêts à l'emploi sont disponibles sur le marché (américain) et sont un succès commercial, les MITS d'Altair, tandis qu'un système d'exploitation CP/M de Digital Research semble rallier l'intérêt de beaucoup de constructeurs. Enfin, Apple fait un succès remarquable avec l'Apple II, sorti en 1978, pour des utilisateurs qui programment, mais aussi qui utilisent, outre la programmation en BASIC (langage avancé mais simple, mis au point pour les microprocesseurs) le premier grand succès des logiciels d'application, permettant de nombreux calculs préprogrammés, le tableur (premier de ce nom) Visicalc.
Le concept de micro-informatique quitte le domaine du hobby, celà devient un outil performant ; il sera peaufiné au tout début des années quatre-vingt, permettant de faire entrer ce qui n'était jusqu'ici qu'un gadget d'ingénieur ou de passionné, dans les bureaux et dans les entreprises. Le PC d'IBM, lancé en 1981, sera accompagné non seulement par un tableur, mais aussi par un traitement de texte, Wordstar, un gestionnaire de base de données (DBase II d'Ashton Tate) et, pour le loisir, du premier simulateur de vol (Flight Simulator). Apple fera rêver les passionnés bien au-delà des scientifiques grâce à des possibilités graphiques évoluées et à l'usage convivial offert par son interface graphique et l'emploi d'une souris (1984). Entre temps, Compaq a imité Amdhal et fait du compatible micro-ordinateur PC d'IBM, ce qui sera copié presqu'à l'infini jusqu'à aujourd'hui...
Les ingénieurs se retrouvent mal à l'aise entre les mini-ordinateurs qu'ils ne peuvent mettre sur leurs bureaux et les calculettes ou les micro-ordinateurs pas assez puissants pour leurs besoins. Sun pense à eux et grâce à un type particulier de microprocesseur fait décoller en 1985 le développement des stations de travail (workstation) ; un peu plus grosses, plus coûteuses, utilisant des langages plus sophistiqués, surtout destinées à faire tourner des programmes réalisés par ses utilisateurs et non pas des logiciels d'application, ces machines ne sont pas loin aujourd'hui d'être confondues avec des super-micros.

La fulgurance micro-électronique

Ce qui est au coeur de cette transformation, ce sont les progrès fulgurants de la micro-électronique, où les générations successives vont se suivre à un rythme infernal, doublant à peu près la capacité de stockage tous les 18 mois selon la loi ou la prophétie auto-réalisatrice énoncée en 1964 par Gordon Moore (co-dirigeant de Intel). D'une capacité de 1 000 unités d'informations élémentaires ou bits en 1971, nous allons aujourd'hui vers la taille d'un milliard de bits sur une puce (1 Gigatbit (2)).
Ces mémoires offrent une capacité phénoménale de stockage qui ne serait rien sans la même explosion des performances du moteur de manipulation de données qu'est le microprocesseur. Le dernier microprocesseur de la suite des générations sorties par Intel travaille sur des mots de 32 ou de 64 bits à une vitesse ahurissante lui permettant de traiter 230 millions d'instructions par seconde, quand le premier de la série culminait à 60 000 instructions par seconde.
Pour les stations de travail, les processeurs RISC (Reduce Instruction Set Computer) qui ont moins de fonctions préprogrammées (chaque microprocesseur, déjà complexe, est utilisé avec des langages aujourd'hui très avancés), remplacent les processeurs CISC (Complex Instruction Set Computer) des micro-ordinateurs. Ceux-ci, bien qu'extrêmement rapides, peuvent être considérés comme trop lents par des utilisateurs qui programment totalement, dans un langage adapté, la manipulation qu'ils souhaitent de leurs données. Ces processeurs RISC ont fait eux-mêmes de remarquables progrès. Les derniers microprocesseurs (voir infra) sont devenus des hybrides empruntant aux deux technologies CISC et RISC.

L'explosion du marché de l'informatique

En 1971, quand naît le microprocesseur, il y a moins de 100 000 ordinateurs dans le monde. Dix ans plus tard, au cours de l'année 1980 on livre 200 000 micro-ordinateurs aux Etats-Unis et trois ans après, en 1983, on y en livre deux millions (Breton, 1987, p. 197). En 1983, sur le marché mondial, les micro-ordinateurs représentent plus du quart des ventes d'ordinateurs contre plus de 40% aux mainframes et 30% aux mini-ordinateurs et l'évolution de leur parc paraît inexorable. Dès 1984, 3 millions d'unités de micro-ordinateurs sont vendus dans le monde. En 1987, les ventes des micro-ordinateurs dépassent en valeur les ventes des autres catégories d'ordinateurs. En 1995, le nombre de micro-ordinateurs vendus est de l'ordre de 60 millions d'unités ce qui, en valeur, représente plus de 60% des ventes mondiales d'ordinateurs.
Il est clair que le marché informatique a été totalement reconfiguré et transformé. Les constructeurs pionniers de l'industrie s'adressaient à des clients privilégiés chez lesquels ils assuraient directement un service de conseil, d'installation, de formation, de suivi. Ces clients, peu nombreux, étaient connus et choyés. Le produit est devenu, avec les micro-ordinateurs, un objet destiné à une clientèle de masse. Sa fiabilité tend à le faire assimiler à un téléviseur et il se trouve aujourd'hui vendu presque sans assistance, par correspondance et dans les supermarchés.
La relation rapide qui vient d'être faite de l'histoire récente de cette industrie est suffisante pour montrer que les conditions dans lesquelles ont eu à travailler les opérateurs ont été celles d'un renouvellement perpétuel, d'une dynamique intense offrant l'opportunité d'une compétition sans relâche. Nous allons maintenant en décrire quelques caractéristiques.

Genèse et affirmation d'une compétition acharnée

La rivalité entre les différents acteurs de l'industrie a été extrêmement vive tout au long de ces années, en raison d'une évolution technique permettant de mettre sur le marché des objets potentiellement de plus en plus intéressants pour des utilisateurs qui doivent cependant, eux aussi, se mettre en situation répétée d'apprentissage pour être des utilisateurs avertis et bénéficier effectivement des avantages potentiels. Il faut considérer trois lieux de concurrence : à celui constitué par ceux qui offrent les sources du progrès technique, les fabricants de circuits intégrés et de microprocesseurs, s'ajoute celui formé de ceux qui, autour de ces éléments, construisent avec une certaine architecture -pas souvent renouvelée- un ordinateur. Le troisième tient au lien entre la machine et l'utilisateur, qui fait apparaître la notion de service informatique, de logiciels de programmation ; c'est là l'origine d'une autre catégorie d'acteurs : les producteurs indépendants de logiciels et donc du troisième lieu de concurrence : les logiciels, ou le software.
La distinction des lieux de concurrence est cependant quelque peu arbitraire, car des constructeurs de micro-ordinateurs de premier plan sont simultanément des fabricants de circuits intégrés, voire de microprocesseurs et de logiciels. Par ailleurs, la concurrence est également transverse : les compétiteurs d'un lieu soumettent parfois à rude épreuve ceux installés sur un autre. Il n'y a donc pas à considérer notre distinction comme la reconnaissance d'un cloisonnement, bien au contraire.

La lutte entre les constructeurs

A sa naissance l'industrie informatique a été en très peu de temps dominée par une firme américaine, IBM (3) ; et quelques autres suivaient assez loin derrière, aux Etats-Unis, puis venaient quelques firmes européennes, une par grand pays européen, toutes ayant bénéficié de commandes et/ou d'aides publiques importantes. Confrontées à une évolution vers la micro-informatique dont elles n'ont pas été les initiatrices, ces firmes vont s'accrocher à cette vision de la grande informatique centralisée. A l'origine de la mini-informatique, Digital Equipment, DEC, en profite pour devenir en 1978, derrière IBM, le numéro 2 de l'informatique mondiale, position qu'il préservera jusqu'en 1990.
Pendant ce temps, le groupe des suivantes américaines se désintégre et son équivalent européen de fabricants d'ordinateurs généraux ne fait guère mieux ; les Bull, ICL, Siemens, Olivetti, Nixdorf subissent fusions, rachats et multiples difficultés entraînant des licenciements massifs. Les belles Américaines subissent, outre le changement radical vers la réduction de taille, une concurrence acharnée des firmes japonaises, grâce aux programmes du MITI. En 1990, dans le classement mondial des ventes, on trouve, derrière IBM et DEC, deux firmes japonaises : Fujitsu, NEC, puis s'intercale une "nouvelle" américaine (par rapport aux pionnières ), Hewlett Packard et enfin Hitachi. En 1995, IBM reste encore leader ; elle est suivie, dans l'ordre, par Fujitsu, Hewlett-Packard, NEC et Compaq. Compaq a été fondée en 1982 et relève entièrement de la micro-informatique.
Dans cette micro-informatique, après une phase de lutte entre les constructeurs informatiques, eux-mêmes contestés par de nouveaux pionniers, ce sont des éléments de marketing qui feront décoller en 1978 Tandy, puis Commodore, avant qu'Apple ne se hisse en tête grâce peut-être à Visicalc, le premier tableur. Les constructeurs sont nombreux et IBM n'a pas su convaincre jusque là. Comme de nombreuses autres firmes (4), elle s'efforce d'offrir de petits systèmes de gestion autour de microprocesseurs. Cependant, le 5100, sorti en 1975 de ses usines, tout comme ensuite le 5110, sont des échecs.
Apple prend la tête des constructeurs au moment même où, en nombre de machines, les micro-ordinateurs donnent l'impression d'une sorte de raz de marée : 200 000 unités vendues aux Etats-Unis. IBM, leader de l'informatique mondiale, ne peut rester absent de cette vague qui paraît bien forte. Elle se lance donc en combinant les lieux de concurrence. IBM choisit le nouveau microprocesseur d'Intel, le 8086, et demande à Microsoft d'écrire son système d'exploitation. Le PC XT est lancé avec une gigantesque campagne de publicité, qui fait appel à l'image de Charlot ; son succès pourra être associé au logiciel de traitement de texte Wordstar, au gestionnaire de base de données DBase II et au logiciel de jeu Flight Simulator. En 1983, et Lotus 1.2.3 aide alors au succès, IBM atteint 30% d'un marché mondial en pleine croissance explosive. Aux Etats-Unis, on dépasse les 2 millions d'ordinateurs vendus cette année là. IBM apparaît comme une locomotive bien supérieure à ce que fut MITS et à ce qu'aurait pu être Apple, et c'est elle qui ouvre grandes les portes des entreprises aux micro-ordinateurs. Compaq s'appuie sur elle en livrant des matériels compatibles IBM que l'on nommera des "clones" ; ceci lui est d'autant plus facile que le microprocesseur et le système d'exploitation du PC XT ne sont pas propriétaires. La concurrence des compatibles ou "clones" viendra aussi beaucoup de l'Asie, de Taïwan et de Singapour, où IBM se fournit pour son clavier et divers composants.
Apple s'efforce de réagir, mais l'Apple III et le Lisa en 1983 sont un échec. En revanche, le MacIntosh, en 1984, est un succès et Apple vendra 10 millions de Mac entre 1984 et 1993, maintenant sa part autour de 10% du marché mondial en très forte croissance. Seul Apple va résister face à l'essor des PC d'IBM et des compatibles. Sa résistance est certainement liée à des caractéristiques de qualité fortement appréciées de certains utilisateurs, caractéristiques qu'on ne trouve chez aucun autre constructeur.
Dans les rangs des PC IBM et compatibles, la bataille fait rage. En premier lieu, IBM voudrait bien se débarrasser de ces parasites qui l'empêchent de dominer ce segment du marché comme elle avait réussi à le faire au milieu des années soixante dans les grands systèmes ; aussi s'efforce-t-elle de mettre sa nouvelle génération de micro-ordinateurs à l'abri de la compatibilité. Le PS/2 est doté d'un nouveau système d'exploitation OS/2 réalisé par Microsoft, mais à l'usage exclusif d'IBM, et d'un bus propriétaire MCA. Mais les clients résistent, y compris dans les entreprises où, déjà dotés de grands systèmes IBM, les ingénieurs mettent sur leurs bureaux personnels des PC. La base installée -c'est à dire le nombre de PC en fonctionnement chez des clients- est importante, les échanges de fichiers et de programmes entre utilisateurs, les habitudes quelquefois patiemment construites des opérateurs constituent un frein assez fort que seules pourraient faire sauter des améliorations ressenties comme très significatives.
Après quelques péripéties et une guerre des prix qui a profité au consommateur, Compaq est devenu en 1994, le premier constructeur mondial. Le marché japonais, relativement inexistant jusque là explose sous les coups d'une bataille de prix comparables, orchestrée là-bas par Fujitsu. Celui-ci a abandonné en 1993 son architecture propriétaire pour fabriquer des compatibles PC IBM et a commencé une offensive de prix surtout menée en 1995, ce qui lui a permis de tripler ses ventes et de menacer le quasi monopole que détenait NEC sur ce marché, doublant IBM et Apple.
La taille du marché des micro-ordinateurs est devenue considérable. Le nombre d'unités (5) vendues annuellement a dépassé en 1993 le nombre de ventes mondiales de véhicules automobiles (39 millions) et, aux Etats-Unis, a doublé, en 1994, le nombre des ventes de téléviseurs (18 millions). En 1995, environ soixante millions de micro-ordinateurs ont été vendus dans le monde pour quelque 125 milliards de dollars (d'après Dataquest). Les ventes mondiales de micro-ordinateurs font apparaître une relative dispersion, même si les dix premiers réalisent cependant la moitié environ des ventes mondiales ; le tableau n° 1 en donne la répartition entre les principaux vendeurs en 1994.
Tableau 1 : Livraisons mondiales de micro-ordinateurs en 1994.
Classt Firmes (pays d'origine) % nombre d'unités
(milliers)
1 COMPAQ (E.U.) 10,0 4 830
2 IBM (E.U.) 8,7 4 227
3 APPLE (E.U.) 8,5 4 125
4 Packard Bell (E.U.)* 4,7 2 285
5 NEC (Japon) 3,5 1 706
6 AST (E.U.)** 2,6 1 285
7 DELL (E.U.) 2,5 1 230
8 Toshiba (Japon) 2,5 1 231
9 H.P. (E.U.) 2,5 1 221
10 ACER (Taiwan) 2,5 1 190
Autres 51,9 25 167
TOTAL 100 48 500
Source : IDC 1995, d'après Financial Times.
* Passe sous le contôle de NEC en 1996
** Participation au capital à hauteur de 40 % par Samsung (Corée).
Notons que dans un certain nombre de cas, les micro-ordinateurs vendus sous la marque d'une firme d'une certaine nationalité sont en fait fabriqués par un constructeur d'une autre nationalité, par exemple taiwanaise, c'est la pratique dite OEM (Original Equipment Manufacturer). Pendant plusieurs années, Acer a vendu ainsi sa production avant de le faire plus récemment sous sa propre marque et apparaître parmi les 10 premiers mondiaux. La pratique OEM est assez répandue dans toute l'industrie informatique. et d'autres "Acer" sont prêts à sortir de l'ombre. Sans aucun doute, une bataille acharnée s'est déroulée entre les constructeurs et la compétition reste extrêmement intense. Tous cependant semblent s'appuyer sur la même électronique offerte par Intel.

L'élixir de jouvence dominatrice d'Intel

Les progrès de la micro-électronique ont bousculé les constructeurs : chaque nouvelle génération de microprocesseurs et de circuits intégrés offre de nouvelles possibilités : amélioration des techniques de programmation, du contrôle des écrans (longtemps 24 lignes de 80 caractères sans possibilité graphique), gestion des disques et autres mémoires, vitesse de travail (en 1978 on en est encore à 4 MHz). La concurrence entre fabricants de microprocesseurs est vive et bientôt il n'en restera plus que quelques-uns aux Etats-Unis avec quelques nouvelles start-up. Des anciens, seuls Intel et Motorola tirent leur épingle du jeu. Intel, choisi par IBM, va cependant rencontrer de graves difficultés ; il est par ailleurs fabricant de mémoires et subit de plein fouet la concurrence japonaise ; il doit abandonner ce secteur. IBM le soutient et prend 20% de son capital en 1983 (participation qui sera rétrocédée quelques années plus tard). Il bénéficiera ensuite de l'essor des PC compatibles, et du système d'exploitation MS DOS, dont les versions successives permettent d'utiliser les améliorations technologiques de ses générations de microprocesseurs.
Toutefois, l'essor d'Intel, qui va devenir en 1992 le leader mondial des vendeurs de semi-conducteurs, n'a pas été obtenu sans compétition. La croissance a été difficile ; elle oblige à utiliser des "secondes sources", pratique qui autorise d'autres entreprises à fabriquer des microprocesseurs Intel. Elle a amené également Intel à prendre des accords de coopération, comme en 1982 avec AMD, pour développer ensemble des microprocesseurs, ceci à une époque où les dessins des circuits intégrés ne sont pas encore protégés par un copyright.
A ces moments de très forte croissance du milieu des années quatre-vingt, AMD, puis des firmes toutes nouvelles, des "start-up" (Cyrix, Nexgen, cette dernière est rachetée en 1995 par AMD) vont mettre sur le marché, quelque temps après la sortie d'une nouvelle génération de microprocesseurs Intel, des microprocesseurs compatibles Intel. Pour maintenir sa part de marché, Intel avait lancé auprès des constructeurs de micro-ordinateurs l'idée de coller une étiquette "Intel inside" pour se différencier de ceux qui s'approvisionnent auprès des concurrents. Il n'est pas très clair jusqu'où un microprocesseur compatible enfreint ce qui est protégé, à tel point qu'IBM elle-même fabrique des microprocesseurs compatibles Intel ; c'est aussi le cas de SGS Thomson qui avait racheté en 1985 la firme américaine Mostek et avait ainsi hérité de l'accord Mostek-Intel autorisant la première à fabriquer des microprocesseurs de conception Intel (6). Cette pression sur Intel est un des éléments importants qui pousse à la baisse des prix et au progrès technique : la baisse des prix rend l'entrée sur le marché plus difficile et la durée pour rentabiliser les investissements effectués est écourtée par l'obsolescence accélérée.
La domination d'Intel sur ce marché en forte croissance et très vaste, dont elle assure la jouvence régulière, s'exerce donc dans un contexte de pression concurrentielle à la baisse des prix. Intel s'inquiète en outre de ce que les améliorations apportées à ses microprocesseurs, à un rythme élevé pour se maintenir en leader vis-à-vis de ses copieurs, soient bien utilisées par les constructeurs de micro-ordinateurs. Sa jouvence est dominatrice et son PDG reproche aux constructeurs de ne pas utiliser au mieux ses microprocesseurs. Il fait le même reproche à Microsoft, même s'il reconnaît qu'il n'était pas envisageable d'abandonner MS DOS, alors que des millions de clients y étaient habitués : le marché des PC est aussi un marché de renouvellement rapide. En revanche, Intel subit la concurrence des fabricants de circuits intégrés tels que Motorola, Analog Device, AT&T, Philips, qui ont développé des processeurs de signal numérique (DSP) peu chers et qui manipulent les signaux numériques audio et vidéo. Or, son Pentium pourrait le faire, y compris sur un PC sans addition de circuit complémentaire. Il a développé à cet effet le NSP (Native Signal Processing), montrant par exemple qu'avec le seul Pentium et un software adapté, le PC pouvait se transformer en outil de vidéoconférence (Financial Times, October 10, 1995). L'année suivante, Intel a sorti le Pentium MMX (MMX pour multimedia), doté d'un jeu d'instructions permettant d'utiliser pleinement des applications multimedia à partir d'un micro-ordinateur. En ce domaine, des reproches sont adressés aux fabricants de software et au premier d'entre eux : Microsoft. C'est ce souci de voir les progrès offerts réellement utilisés qui pousse par ailleurs Intel à fabriquer des cartes-mères, ce qui permet à des petits constructeurs assembleurs de mettre sur le marché des PC, concurrencant les constructeurs plus grands qui ne mettent pas toujours au point des cartes-mères de meilleure performance. En fait, ses compétiteurs principaux sont des fabricants taïwanais qui sont à l'origine, en 1995, de plus de 7 millions de PC, dont beaucoup revendus sous des marques américaines.
Venons en maintenant au troisième lieu annoncé de compétition, les logiciels.

La convivialité possessive et exclusive de Microsoft

Microsoft offre des produits situés à l'interface entre les micro-électroniciens et les constructeurs d'ordinateur, et qui sont également à l'interface, entre la machine et l'utilisateur. Pour la première et la seconde interface, il sert un même logiciel dit système d'exploitation, pour la seconde seulement il faut y ajouter tous les logiciels d'application (qui au début se résumaient presque à un seul : un langage de programmation). Nous ne rappelerons pas un des points difficiles de l'offre de ces logiciels : leur coût marginal de re-production, dès la deuxième unité, est infime au regard d'un coût de conception très élevé et d'une durée de conception très longue.
Les premières années de l'industrie ont montré un foisonnement de l'offre de systèmes indépendants et incompatibles ; toutefois, on a vu émerger très rapidement des normes et des standards, ce qui doit être considéré comme la reconnaissance d'un "besoin" de standardisation et de compatibilité. En 1984, trois ans après le lancement de l'IBM PC appuyé sur le DOS de Microsoft, le système d'exploitation CP/M détient encore plus de 50% du marché mondial, mais Microsoft a su avoir auprès des constructeurs offrant des packages (une machine et des logiciels d'exploitation et d'application) une politique plus convaincante que celle de Digital Research, qui bénéficiait pourtant d'un effet base installée et de l'existence d'un très grand nombre de logiciels d'application (et de bibliothèques de programmes écrits). L'inertie n'a donc pas été excessive (7) On peut y trouver trois raisons. La première, c'est que le nombre d'unités vendues s'accroît de manière réellement faramineuse : en 1984, on ne livre encore que 3 millions d'unités ; en 1992 on dépasse les 30 millions d'unités. En outre, les utilisateurs anciens sont pour l'essentiel des passionnés, et donc capables de changer de système (8) si un intérêt même relativement faible y pousse. Ceci est une deuxième raison. La troisième raison concerne l'attrait que va constituer pour tous ces nouveaux utilisateurs des logiciels d'application particulièrement adaptés. La formidable campagne d'IBM va attirer la production de logiciels MS DOS, ce qui permet de dire qu'IBM a été la fusée mettant sur orbite Microsoft et a permis l'essor de quelques fabricants de logiciels qui ont à leur tour, par la qualité et la performance de leurs produits, contribué au succès du PC et du MS DOS et ultérieurement des compatibles et des versions améliorées du MS DOS.
Toutefois, et en dépit du déploiement d'une intense activité marketing par IBM, le succès du PC XT n'était pas évident. Microsoft était une toute petite entreprise ; Intel sera même en difficulté et IBM devra l'aider en participant à son capital (cf supra). En ce qui concerne les systèmes d'exploitation, Digital Research était bien implanté et détiendra encore en 1984 la moitié du marché mondial. Les firmes japonaises résistent également ; le marché japonais va d'ailleurs échapper presque en totalité à MS DOS jusqu'en 1993. Le leader du marché des PC japonais, NEC, livrait avec ses machines un système qui lui est propre, même s'il livrait ailleurs dans le monde des PC compatibles IBM. Toutefois, le marché japonais n'était pas très important. Microsoft a cependant essayé d'implanter sans succès en 1983, un système propre -sans IBM mais avec des alliances japonaises- pour des micros familiaux reliés à des ordinateurs, le MSX. La réussite n'a donc rien d'automatique.
Deux batailles principales ont été livrées ; entre Microsoft et IBM d'une part, et entre Microsoft et Apple d'autre part. IBM aurait voulu poursuivre le succès du lancement du PC pour dominer effectivement la micro-informatique comme elle l'avait fait de la grande à la fin des années soixante. Elle s'est trouvée gênée par le monde des clones qui profitaient pleinement de ce qu'elle construisait sa machine avec des fournisseurs extérieurs ("outsourcing") : le micro-processeur venait d'Intel, le système d'exploitation PC DOS de Microsoft qui pouvait le vendre sous le nom de MS DOS et ses versions successives à tout un chacun. Pour rediriger ces ventes vers ses matériels, IBM a donc essayé de lancer en 1987 un nouveau Bus propriétaire et d'utiliser un nouveau système d'exploitation OS2 -préparé par Microsoft- avec une interface graphique, "Presentation manager". La campagne publicitaire a été moins intense, les utilisateurs du DOS (déjà plusieurs millions) et les particuliers comme les entreprises ont hésité : ces utilisateurs avaient mis un certain temps d'apprentissage à maîtriser à peu près leur PC, les logiciels d'application qu'ils utilisaient n'avaient pas de version OS2. Le marché n'a pas flambé pour cette nouveauté ; Lotus 1.2.3 ne s'est pas précipité dans l'opération pour donner rapidement une version de son tableur utilisable sous Presentation manager. IBM a pêché par excès de confiance dans un outil qui était certainement supérieur au MS DOS disponible sur les PC. Microsoft lui-même n'a pas soutenu exclusivement cette stratégie d'IBM. Conscient de son rôle clé et fort des ressources engrangées, Microsoft a suivi sa propre stratégie de compatibilité avec son MS DOS, choyant possessivement sa base cliente pour la fidéliser. Mais, pour une part, cette première bataille rejoint la seconde, celle avec Apple.
Apple qui était leader en 1980 va se trouver supplanté par IBM, mais ne sera pas sans réagir. Son système d'exploitation n'a rien à envier à MS-DOS, bien au contraire, et ses micro-ordinateurs disposent d'une clientèle organisée en clubs, etc : il existe tout un "monde" Apple. Apple III et Lisa en 1983 sont un échec, mais le MacIntosh lancé en 1984 sera un succès. Avec le MacIntosh, Apple dispose d'une machine et d'un système d'exploitation indéniablement supérieurs d'un point de vue technique au PC (et à sa dernière version pour le PC AT lancé cette même année 1984) et à MS DOS. L'interface graphique est remarquable (elle va permettre à Apple de garder aujourd'hui encore 77% du marché de la publication assistée par micro-ordinateur (PAO) et 64% du marché de l'éducatif). Apple a utilisé cette supériorité pour vendre ses micro-ordinateurs beaucoup plus chers que les PC et s'offrir des marges très élevées. C'est un incontestable succès : 10 millions de Mac vendus entre 1984 et 1993, sans clones. Sa performance solitaire est comparable à celle d'IBM, mais pas sur le logiciel d'exploitation vis-à-vis de Microsoft.
Microsoft a en effet bénéficié d'être vendu potentiellement sur l'ensemble des compatibles IBM PC, et surtout il a su offrir à la base installée un outil d'interface graphique compatible avec DOS, améliorant la convivialité et justifiant l'emploi de la souris. Microsoft sort en mai 1990 Windows 3.0, dont plus d'un million d'exemplaires sont vendus en quelques mois. Entre 1990 et 1993, il s'en vendra 40 millions de copies, quatre fois le nombre de ventes de Mac entre 1984 et 1993. La stratégie solitaire d'Apple par rapport à la constellation obligée de clones entourant IBM a privé son interface d'une pénétration plus importante du marché, et le succès de Microsoft a permis à ce dernier de préparer une version améliorée : Windows 95. Microsoft, devenu une firme très prospère, a fait un effort marketing formidable pour lancer en 1995 son nouveau Windows qui offre une convivialité possessive et exclusive (9).
D'un point de vue technique, Windows 95 semble, aux yeux des analystes, offrir un équivalent à l'interface graphique présente actuellement sur les machines Apple (cf. par exemple Himowitz, 1996). La pression sur Apple a été très forte, car la justification d'un prix plus élevé disparaît. Apple s'est alors lancé dans une réduction des prix et de ses marges qui, combinée avec une conjoncture de Noël 1995 très médiocre par rapport aux espérances, a failli lui coûter son rachat (10) . Apple résiste difficilement, les Japonais en revanche semblent s'être inclinés. Fujitsu a adopté la version japonaise DOS V en 1994, NEC abandonne l'incompatibilité en 1995 après avoir signé en décembre 1995 avec Microsoft un accord pour le futur Windows 97. Par ailleurs, la concurrence directe n'existe pratiquement plus, DR DOS ayant abandonné le terrain. En effet, Novell -spécialiste des logiciels d'exploitation de réseau- qui avait racheté Digital Research en 1991 et attaqué Microsoft en justice dans la foulée, a jeté l'éponge en 1994. Microsoft semble ainsi avoir gagné la bataille difficile des systèmes d'exploitation pour micro-ordinateurs indépendants. Il a cependant joué dans cette bataille une autre carte que nous n'avons pas examinée jusqu'ici, qui est celle de l'interaction avec les logiciels d'application, marché qu'il domine aujourd'hui également. Nous ne donnerons pas un descriptif de cette bataille, mais nous allons souligner de quelle manière Microsoft a procédé au renversement des leaders des différents segments. Il a utilisé le fait qu'il était à l'origine des versions successives de DOS et de Windows pour sortir des logiciels d'application performants, tandis que les concurrents n'étaient pas capables de différencier leurs produits. De manière symétrique, ces logiciels, à facilité d'utilisation accrue sous Windows, ont renforcé la migration des utilisateurs vers les PC compatibles avec DOS/Windows et détourné vers ceux-ci des utilisateurs qui auraient pu -plus facilement si les prix avaient été plus accessibles- devenir des acheteurs de produits Apple.
Face à cette domination, la réaction des concurrents a été inefficace. Ainsi, Novell, qui s'était saisi de DR DOS en 1991 pour capituler en 1994 ,a racheté cette même année l'ancien leader du traitement de texte, WordPerfect pour la coquette somme de 1,4 milliard de dollars et Borland International pour le tableur QuattroPro (145 millions de dollars) sans montrer plus de réussite que pour DR DOS. Les ventes de WordPerfect ont été divisées par deux et la sortie d'une version compatible Windows 95 n'est pas encore annoncée. La stratégie d'achat ne semble pas avoir été la bonne. IBM elle-même s'est aventurée dans une stratégie de rachat, lançant en juin 1995 la première OPA hostile de son histoire pour acquérir Lotus au prix de 3,5 milliards de dollars. L'objectif n'était pas le tableur Lotus 1.2.3, en perte de vitesse, mais le logiciel Lotus Notes, leader incontesté (3 millions d'utilisateurs) des logiciels de travail de groupe sur un réseau au sein d'une entreprise. Bien qu'ayant divisé par deux le prix par ordinateur de ce logiciel (en décembre 1995), son avenir ne semble plus aussi brillant qu'il semblait, et en tout cas ne semble pas constituer l'outil permettant de contrarier la position dominante de Microsoft.

Un avenir disputé

Les machines vendues aujourd'hui sont équipées pour les trois-quarts d'entre elles d'un microprocesseur fabriqué par Intel (Etats-Unis) et d'un logiciel d'exploitation (11) de Microsoft (Etats-Unis) : d'où l'expression du monopole "Wintel". L'influence d'Intel et de Microsoft s'élargit au-delà de leur domaine de base. Intel, voyant tarder l'emploi de ses nouveaux microprocesseurs, a investi dans la production des carte-mères qui constituent l'ensemble de l'électronique de base et en a livré 10 millions en 1995, ce qui représente presque 25 % du marché mondial. Cette part pourrait atteindre 40 % en 1996. Microsoft détient une part importante du marché des logiciels d'application ; en valeur, tous logiciels micro-ordinateurs confondus, cette part est de l'ordre de 40 %, avec en particulier le traitement de texte Word et le tableur Excel. Il reste néanmoins un grand nombre de vendeurs indépendants de logiciels (souvent "petits"), qui rendent disponibles quelques milliers d'applications spécifiques.
Peut-on, à l'issu de ce panorama, considérer que s'est installé un oligopole mondial de l'industrie de la micro-informatique ? D'une certaine manière oui, même si la situation est fort éloignée des critères académiques de la théorie économique. La ligue de la dizaine des premiers vendeurs se retrouve sur tous les marchés mondiaux -à des places parfois différentes- et chacun "se marque", surveillant les prix pratiqués par les uns et les autres et l'évolution des parts de marché que plusieurs cabinets de consultants publient régulièrement (Dataquest, IDC pour citer les deux plus connus). Oui, aussi, parce que de nombreux "composants de la machine" sont réalisés à plus des trois-quarts par un tout petit nombre de leaders, quatre ou cinq, et qu'en particulier le moteur, mais aussi l'essence spéciale qu'il requiert, à savoir le microprocesseur et le logiciel d'exploitation, sont aux mains d'un duo, Intel et Microsoft. Dans la configuration présente, et eu égard au caractère clé des composants qu'ils offrent, on serait tenté de qualifier leur position de monopole sur l'industrie informatique et de soupçonner qu'ils tirent des profits abusifs de leur position dominante, sans offrir aux utilisateurs tous les services et le progrès des services micro-informatiques que ces utilisateurs pourraient espérer. La domination du bipole Wintel peut donc être attestée. Est-elle contestable ?
Pour traiter de manière satisfaisante l'avenir du bipole Wintel, il faudrait, par exemple, avoir des certitudes sur ce que sera demain la configuration de la micro-informatique et évaluer les potentiels des deux acteurs dominants eu égard à ce futur, en les comparant tant aux opportunités qu'il peut offrir à des concurrents en place qu'à la probabilité qu'il peut offrir d'en faire naître de nouveaux. Or ce futur n'est que très imparfaitement imaginable, car il sera dessiné pour partie par les réactions de la demande, des "clients", qui ont leurs aspirations propres mais qui sont aussi sollicités, avec plus ou moins de bonheur parfois selon la position de la sollicitation dans la chronologie de l'ensemble de celles reçues, par des offreurs qui se font concurrence, avec des améliorations, des nouveautés, des ruptures... La régulation menant à ce futur est le fait d'une véritable rivalité, même si elle n'est pas concurrentielle au sens de la théorie (de la concurrence pure et parfaite). Elle n'est pas plus, pour le moment, "systémique", au sens où nous l'entendions (Humbert, 1988).
Sans pouvoir faire un tour complet d'une série de scénarios possibles, il est cependant facile de lire quelles sont les tendances, ou les forces de changement susceptibles de devoir être supportées ou portées par nos deux acteurs dominants. Comme nous l'avons suggéré dès l'introduction, et qui a été confirmé par ce qui a été retracé et analysé au cours de cet article, le micro-ordinateur tend à être un objet, un outil des plus conviviaux, passible en conséquence d'utilisation massive et pour des besoins qui se sont étendus au traitement et à la manipulation de toutes les formes d'informations audio-visuelles ; pas seulement pour des calculs, du traitement de textes, mais par exemple pour le traitement d'images de type photographique ou de sons de type musique d'orchestre etc... En outre cet objet est de moins en moins cantonné à un usage indépendant et autonome, mais doit de plus en plus, pour satisfaire pleinement l'utilisateur et donner tout ce qu'il est capable d'apporter, se brancher sur d'autres micro-ordinateurs, s'insérer sur un réseau, se connecter à des réseaux de réseaux, entrer dans les télécommunications au sens large, du téléphone à l'internet ou aux autoroutes de l'information en passant par les réseaux de site et les chaînes de télévision.
Tout cela exige encore quelques progrès significatifs de l'offre, vu du côté de tout ce qui améliore les performances et les prix des micro-ordinateurs (a), et simultanément un positionnement de produits adaptés vis à vis d'une demande potentielle dont la croissance sur certains segments pourrait se produire à des rythmes plus élevés encore que tout ce qui a été enregistré jusqu'aujourd'hui (b). On est d'autant plus étonné de l'absence de toute stratégie collective de régulation (c).

Les bases des nouveaux profils

Le socle sur lequel repose la nouvelle micro-informatique reste le microprocesseur ; c'est lui le moteur, c'est aussi la pièce principale en valeur dont va dépendre le prix du micro-ordinateur qui veut aujourd'hui devenir un produit de consommation de masse. Cela exige de descendre sous la barre des 10 000 FF (ou 2 000 $). Simultanément les performances doivent être étendues, en rapidité et en capacité images, graphiques, audio. Intel, bien que leader, joue une partie délicate et plusieurs de ses concurrents restent très dangereux, comme le montre ce qui s'est passé au début de 1997. La première semaine d'avril, AMD a sorti son nouveau microprocesseur, le K6, aux caractéristiques supérieures à celles de tous les concurrents disponibles sur le marché et en particulier à celles des microprocesseurs Intel, y inclus le Pentium MMX dont on a parlé plus haut. Ce microprocesseur K6, compatible avec les cartes mères équipant les micro-ordinateurs déjà en vente et la plupart de ceux du parc mondial, offre donc une possibilité de montée en puissance ("upgrading") des matériels existant à un prix de 30% inférieur à celui de son concurrent chez Intel. Un mois plus tard, Intel a mis sur le marché le Pentium II, plus puissant que le K6, mais deux fois plus cher et surtout non-compatible avec les cartes mères existantes. Il est destiné aux micro-ordinateurs haut de gamme. Intel s'efforce manifestement, mais avec difficulté, de maintenir son avance et de se protéger par une certaine dose d'incompatibilité (l'architecture électrique de la nouvelle connexion est gardée secrète). Un mois plus tard, début juin 1997, c'est au tour de Cyrix de lancer un nouveau microprocesseur, le PR233, pour le moins comparable au K6 d'AMD et au Pentium MMX d'Intel, avec des prix encore plus bas, tout à fait adaptés au lancement de produits de masse. La rivalité dans ce domaine, face à Intel, reste bien réelle, la compétition intense et son issue n'a rien de certain.
La montée des réseaux gonfle le marché et les exigences de fiabilité et de simplicité de la gestion et de l'exploitation de ces réseaux. Dans ce domaine, Microsoft espère voir renverser la position dominante de Novell à son profit. Le produit de Microsoft, Windows NT a un avantage dans le contexte de cette montée des réseaux, car il est à la fois système d'exploitation et gestionnaire de réseau. De fait, il grignote des parts de marché sur Netware, le gestionnaire de réseau de Novell qui détenait encore 72% du marché mondial et deux tiers du parc installé en 1994. Il bénéficie également de ce que Unix, qui sert alors le plus souvent de système d'exploitation, existe en mille et une versions que plus de dix ans de tentatives d'unification n'ont pas encore réussi à harmoniser pour en faire un système d'exploitation unique.
Une autre firme pourrait émerger comme un acteur important de la micro-informatique des autoroutes de l'information, c'est Cisco. Son chiffre d'affaires croît très vite (après de nombreux rachats de concurrents) et atteint maintenant la moitié de celui de Microsoft ; en outre l'industrie qu'elle domine est en pleine explosion. Elle détient 75% du marché des routeurs, ces ordinateurs qui connectent les réseaux entre eux et qui permettent à nos "e-mail" partis de France de pas se perdre pour rejoindre un autre point perdu sur la planète. C'est un peu plus compliqué que ces commutateurs qui jalonnent aussi ces "lignes", et pour lesquels Cisco est aussi leader mondial. Sans ces produits, pas d'Internet, pas d'autoroutes de l'information. Une fois nos messages sorti de notre réseau local, les commutateurs et les routeurs par lesquels ils vont transiter sont des produits d'un marché où Cisco est le n°1 mondial. Peu connue aujourd'hui cette firme détient cependant un savoir -clé, une des bases sur lesquelles le futur est en train de se construire.

Les segments porteurs

Le premier segment porteur est celui du branchement sur les autoroutes de l'information, et en particulier sur Internet. Microsoft a tardé à faire son entrée sur Internet, ne créant une division consacrée à ce segment qu'en 1996, mais son retour en force s'est confirmé. Netscape ne domine plus de manière monopolistique le segment des logiciels de navigation ou "browsers" ; l'explorer de Microsoft détient maintenant 30% du marché devenu duopolistique. Microsoft a utilisé sa stratégie habituelle, en intégrant son navigateur à Windows 95 et en dotant les logiciels inclus de facilités d'interaction avec Internet. Netscape qui rêvait de venir troubler le bipole Wintel, se trouve maintenant très nettement sur la défensive. Certes , sur ce segment, Microsoft est encore second, assez loin derrière Netscape. En outre l'avenir du marché de l'accès à Internet passe aussi par l'emploi de machines bon marché et peu sophistiquées à utiliser, ce qui peut discréditer un système aussi volumineux et gourmand que Windows 95. Mais après avoir beaucoup hésité, Microsoft s'est converti en mai 1997 à l'idée du Network Computer, ou ordinateur de réseau, terminal très bon marché (de l'ordre de 2 500 F) qui, branché sur un réseau (piloté éventuellement sur un micro-ordinateur haut de gamme), peut alors, en partageant des ressources locales, tout faire, et en particulier utiliser aussi les ressources disponibles sur Internet. Dans ce domaine, Oracle, Sun mais aussi Intel, IBM et quelques autres, en s'appuyant notamment sur le système "ouvert" Java mis au point par Sun, vont nourrir une compétition serrée dont il est difficile d'imaginer avec certitude ce qu'il en ressortira.
Le deuxième segment porteur est l'enjeu d'une bataille à peine lancée et qui concerne, dit de manière ramassée, la fusion du micro-ordinateur et du téléviseur, le "mediatron" (Humbert, 1991). La télévision s'est engagée, en partant de la perspective de la haute définition, vers le numérique, ce qui devrait permettre pour un côut de l'ordre de quelques centaines de francs, de transformer n'importe quel micro-ordinateur en récepteur de télévision numérique. Tant Microsoft qu'Intel ou Compaq se montrent extrêmement attentifs à cette évolution qui intéresse également les diffuseurs de programmes de télévision et les fabricants de récepteurs. Ainsi Astra (le système "luxembourgeois" de satellites européen de télédiffusion) s'est associé à Intel en mars 1997 pour des diffusions de programmes audiovisuels destinés aux micro-ordinateurs installés en Europe. Des fabricants de téléviseurs comme Sony ou Philips préparent des téléviseurs capables de recevoir des données, tout en essayant de tenir pour acquis que les téléspectateurs ne veulent pas d'un micro-ordinateur dans leur salon. Microsoft a lui même investi dans la TV sur Internet, en achetant en avril 1997 WebTV qui offre des accès internet via la télévision. Toshiba, leader des micro-ordinateurs portables et fabricant de téléviseurs et de divers produits d'électronique grand public dont le futur DVD, a sorti, quant à lui avec son Infinia, le premier micro-ordinateur destiné au salon. Il peut être piloté depuis un fauteuil grâce à sa télécommande et sa souris originale. C'est à la fois un téléviseur, un ordinateur, une chaîne hi-fi qui peut permettre d'écouter et de regarder de non seulement les ressources locales mais celles du monde entier et communiquer avec tout point de la planète, de son fauteuil... Nous ne retraçons pas ici l'intense bataille qui a cours sur les normes, ni celle qui s'annonce pour trouver la bonne conception qui permettra que l'avenir ne se limite pas à la -déjà bien forte- croissance habituelle du nombre de micro-ordinateurs vendus dans le monde. Il s'y est vendu peu à peu plus de "micros" que de "télés" ; l'espoir des offreurs, c'est de renouveler entièrement les parcs des deux types d'appareils et de multiplier le nombre de ces médiatrons dans chaque foyer ; qu'il y en ait peut-être autant qu'il y a de machines à donner l'heure et que leur croissance soit du type de ce qu'a été celle du nombre de montres quand les montres électroniques ont remplacé les montres mécaniques...

L'absence de stratégie collective

Les nouveaux défis de la micro-informatique sont ceux de l'entrée de plain-pied dans l'ère de la communication planétaire, où ce qui paraissait il y a encore une quinzaine d'années comme des "micro-folies" sont en train de devenir une réalité -même si celle-ci a des aspects virtuels- au sein de laquelle se meuvent les premières générations de "micropholistes". Le bouleversement de nos manières de produire, de consommer, d'entrer en relation, est certainement tout aussi important que ce qui perturbe notre environnement vert. Et pourtant la société civile réagit peu, en tout cas très timidement, par rapport à ce qu'elle montre comme capacité de réaction quant à la manière dont est mis en cause notre environnement naturel. Ainsi, par exemple, nulle assemblée générale mondiale ne s'efforce de maîtriser ce que sera notre avenir à l'ère de la communication ; le tout est laissé à la libre compétition des acteurs privés, à la mise en place en quelque sorte d'un ordre spontané. Il ne s'agit même pas de faire respecter d'éventuelles règles de la concurrence internationale ; les spécialistes ont bien montré que nous n'étions pas à la veille de l'instauration d'un droit international de la concurrence (Brault, 1995) ; autant dire que le vide collectif international est parfait. La rivalité débridée des acteurs privés a toute latitude pour faire émerger des confrontations à notre futur, le meilleur possible.
On pourrait penser qu'au sein des collectifs nationaux s'organise une réflexion d'ampleur et que se décident un certain nombre d'actions, surtout dans les lieux d'où ne sont pas originaires les firmes dominantes ; elles sont en effet principalement américaines, japonaises et coréennes. En France, en Europe, par exemple ? Il n'en est rien. On sait pourtant qu'aux Etats-Unis, 1% de la croissance depuis 1992 est expliqué par les emplois liés aux technologies de l'information et donc en quelque sorte liés à la diffusion de la micro-informatique. En revanche, l'Europe, selon un rapport remis aux ministères de l'industrie des pays de l'Union Européenne (12), a enregistré en deux ans un manque à gagner d'un million d'emplois, parce qu'elle sous-utilise l'informatique et les services de télécommunications. En France, il y a en 1996, 250 000 utilisateurs réguliers d'Internet ; ils sont 30 millions aux Etats-Unis où la FCC (organisme national de régulation des télécommunications) a adopté, en mai 1997, l'objectif -et prend les mesures nécessaires pour l'atteindre- d'un accès à Internet pour toutes les écoles (les salles de classe) et toutes les bibliothèques américaines.
Le rapprochement de ces diverses données ne constitue pas une démonstration mais incite à ouvrir un débat. Les responsables des politiques, en particulier économiques, la société civile, n'ont-ils pas à définir leurs objectifs, leur stratégie collective, face aux défis de la nouvelle micro-informatique ? N'y a-t-il rien de plus à faire pour sa diffusion, n'y a-t-il vraiment pas la place pour une forme de politique industrielle, pour une politique de la concurrence, pour des accords internationaux, qui ne laissent pas l'avenir résulter du jeu complexe des interactions entre les acteurs d'un oligopole mondial ?

Notes

  1. Il n'est peut-être pas utile de rappeler que les anglosaxons continuent de les nommer des "calculateurs" (computers) ; grâce à IBM, la francisation nous a offert un néologisme qui évoque une extension du sens proche du "traitement électronique des données" (Electronic data processing), dénomination que les Américains avaient trouvée pour cette industrie qui, après le traitement des calculs, s'est intéressée à celui des textes, puis des images, des sons... La nature du produit informatique a déjà été présentée dans cette revue, en particulier par Delapierre et Zimmermann (1994a).
  2. Toute l'Encyclopedie Universalis n'utilisera qu'environ 60 % de la capacité d'une telle puce, où on pourra aussi mettre tout un film de cinéma avec une définition comparable aux actuels magnétoscopes.
  3. Un analyse approfondie de l'évolution de l'industrie et du déclin relatif de la domination d'IBM a déjà été présentée dans cette revue par Delapierre et Zimmermann (1994b).
  4. Burroughs, Honeywell, NCR, Olivetti, Philips, Data General et aussi Hewlett Packard et Wang.
  5. Nous entendons par unité l'objet-central de la "machine", le micro-ordinateur, sans prendre en considération sa configuration et la panoplie des objets et logiciels indispensables et/ou complémentaires.
  6. Un tribunal du Texas a autorisé SGS Thomson à fabriquer ses microprocesseurs, non seulement dans l'ancienne usine de Mostek mais, aussi dans n'importe quelle de ses usines aux Etats-Unis et en Europe (Le Monde, 10.01.1995).
  7. Selon les économistes spécialistes des réseaux, la base installée peut exercer un effet d'inertie jouant comme une barrière à l'entrée dans un nouveau système ; voir par exemple Farrel et Saloner (1986).
  8. Certains de ceux-là, ou du même type, vont voir chez Apple, feront la fête à OS/2 ou migrent vers UNIX. Ils ne sont qu'une minorité dans la masse des utilisateurs de PC.
  9. En particulier ce système semble repérer et rendre difficile d'utiliser les logiciels d'application d'origine non Microsoft non agréés très explicitement et concurrents de logiciels Microsoft.
  10. Même si les rumeurs d'achat ne se sont pas entièrement tues, le PDG a disparu : M. Spindler a cédé la place à G. Amelio. M. Spindler avait pris la direction d'Apple en 1993 lors d'une précédente alerte face à la guerre des prix des PC, qui avait obligé Apple lui-même à réduire les siens. Il avait alors remplacé John Sculley, venu du marketing de Pepsi ; il avait en 1985 été à l'origine de l'exploitation commerciale réussie du Mac (et de son imprimante laser) après avoir débarqué Steve Jobs qui s'était focalisé sur la recherche de performances techniques les plus avancées. Steve Jobs avait fondé Apple en 1977 avec Stephen Wozniack. Fin 1996, Amelio rachète Next, l'entreprise fondée par Jobs à son départ, et lui confie de restaurer une avance technologique pour Apple. En 1997, Oracle essaie de racheter Apple qui continue de perdre des parts de marché et de licencier du personnel.
  11. Les parts de marché respectives des différents systèmes d'exploitation des micro-ordinateurs en 1995 sont les suivantes : Windows, 87%, MS-DOS, 2%, Apple, 6%, OS/2, 2% (Source : Financial Times, 6 Nov 1996).
  12. Rapport du cabinet Booz Allen & Hamilton, cité par Le Figaro, 4 Juin 1997.

bibliographie