Les champs qualitatifs, dialectiques et exp?rimentaux de l'art ?lectronique R?jane Spitz
Le moyeu de la roue peut avoir trente rayons
D'un trou percé à travers le moyeu dépend son utilité.
L'argilière du potier forme un récipient
C'est l'intérieur du vase qui rend service.
La maison s'appuie sur des murs solides
Seul le néant de la porte et de la fenêtre la rend habitable.
Ce qui existe peut être transformé, mais
Ce qui n'existe pas offre des usages sans limite.
Lao-Tseu
 
 
Résumé
Cet essai est la traduction de la communication présentée par Réjane Spitz au FISEA, 4éme Symposium International des Arts Electroniques qui s'est tenu en 1993 à Minneapolis (USA). L'intérêt suscité par cette communication lors du congrès, mais également a posteriori, justifie que la contribution de Réjane Spitz au débat actuel sur les arts électroniques soit publiée dans Terminal et donc accessible désormais aux lecteurs francophones. Nous signalons que le texte original a déjà été publié en anglais dans les actes du FISEA, puis par la Lettre de l'ANAT (Australian Network for Art & Technology Newsletter, juillet 1994), et nous remercions Réjane Spitz pour son aimable autorisation et sa collaboration désintéressée.
 
 
Qualitative, dialectical, and experimental domaines of electronic art
Abstract
The following is a translation of the paper presented by Rejane Spitz at FISEA (Fourth International Symposium on Electronic Arts) in Minneapolis, on November 1993. The paper generated a great deal of interest among those that attended. We thank Rejane Spitz for allowing us to publish it in Terminal, a French-speaking review. The english original text has been previously published in the FISEA conference proceedings and then, in the July 94 issue of the ANAT Newsletter (The Australian Network for Art & Technology).
 

Il fut peut-être une époque où, quelle que soit la culture d'appartenance, les hommes manipulaient des objets grosso modo semblables, utilisés pour les mêmes tâches et demandant des capacités similaires. Dans une perspective plus actuelle, alors que les développements technologiques accroissent rapidement et de façon dramatique les différences entre sociétés, cette vision égalitaire semble absurde et naïve. Les divers pays sont désormais catalogués essentiellement en fonction de leur stade de développement technologique, sans tenir compte de leurs ressources naturelles, de leur territoire, de leur peuple ou de leur culture. C'est la technologie qui induit cette fracture planétaire entre le Nord et le Sud.

L'empreinte de la domination technologique
L'usage toujours plus répandu de la technologie informatique pose des problèmes cruciaux aux pays en développement et nous amène à reconsidérer le paradigme selon lequel la technologie est toujours synonyme de progrès. Le style de vie moderne imposé par la société de consommation -modèle inspiré par l'Occident- conduit à l'adoption d'un système unique, tant pour les pays développés que pour ceux en développement. Ce modèle compromet voire, dans la plupart des cas, inhibe la possibilité de création d'alternatives technologiques distinctes en fonction des paramètres économiques, sociaux et culturels d'un contexte donné.
Des groupes distincts peuvent apporter des solutions différentes au même problème. En Inde, les chameaux sont encore largement utilisés dans bien des villes comme moyen de transport. En Thaïlande, des millions de motocyclettes ont été transformés en tricycles couverts, appelés « tuc-tuc ». Une sorte de pousse-pousse -tiré par un vélo- constitue un autre exemple de moyen de transport fréquemment utilisé dans beaucoup de pays asiatiques. Au Brésil, on aperçoit couramment des attelages à chevaux et des chars à boeufs dans les zones rurales. En Chine, la bicyclette -il en existe de tous les modèles et de toutes les tailles- constitue le moyen de locomotion le plus populaire. Expression de la créativité et du génie, la faculté d'adaptation aux besoins de chaque groupe d'usagers constitue le dénominateur commun de ces engins. Mais, fondamentalement, les voitures se ressemblent toutes, que ce soit en Inde, en Thaïlande, en Chine ou au Brésil, comme en Europe ou en Amérique du Nord. Il ne s'agit pas de l'expansion internationale d'un processus de production optimal qui prévaut sur d'autres produits en raison de ses qualités intrinsèques. Il s'agit du produit de la domination technologique.
Mais, tandis qu'automobiles, réfrigérateurs, motocyclettes et téléphones répandus de par le monde se ressemblent peu ou prou, les ordinateurs représentent indiscutablement, pour notre époque, l'exemple le plus menaçant de domination technologique et culturelle qui soit. Comme outil intellectuel, l'ordinateur constitue un environnement présentant de nombreux biais, dont il promeut les valeurs sous-jacentes (1). Par essence, un système informatique représente les points de vue, les attitudes et la logique prédominants en Occident. L'émergence d'alternatives technologiques, conçues par des groupes de recherche en informatique localisés dans les pays en développement, n'est pas chose aisée, principalement pour des raisons économiques. Résultat inévitable, seul un modèle spécifique de technologie du traitement de l'information se répand à travers le monde.
Vers de nouvelles exclusions ?
L'utilisation croissante de technologies apparentées à l'informatique dans les pays en développement - pays dans lesquels l'analphabétisme atteint des niveaux importants et représente un problème social majeur, aboutit à une situation vraiment critique. A l'inverse d'autres technologies comme la radio ou la télévision, très populaires parmi les gens illettrés dans ces pays, les systèmes informatiques demeurent, pour l'essentiel, encore fondés sur la communication verbale écrite. Jusqu'à présent, l'utilisation des ordinateurs dans le Tiers-Monde se limite à l'industrie, au secteur des services et aux universités. Mais l'échelle du développement technologique semble se situer sur une courbe de croissance inexorable. On prédit que, dans un futur proche, les gens dans ces pays auront besoin de communiquer avec des équipements informatiques pour la plupart de leurs tâches quotidiennes, comme c'est le cas déjà dans les pays développés. Dans le monde moderne, d'après Nicholas Negroponte, chaque individu utilise au moins 12 micro-processeurs par jour, du télécopieur jusqu'aux appareils mé<Ðnagers (2).
Cette perspective jette une lumière crue sur le problème de l'illettrisme informatique. Comme Paulo Freire l'expose dans son ouvrage "Pédagogie des opprimés" (3), ce n'est pas une question de savoir lire et écrire, mais d'être capable, en tant que générateur de culture, de "s'exprimer avec ses propres mots". C'est la signification du contenu des échanges qui compte dans un dialogue, pas simplement la répétition mécanique d'énoncés. On peut alors se demander ce que signifie la notion d' "éducation de base en informatique". Est elle liée à l'utilisation des touches du clavier et des icônes, ou bien à la compréhension de la logique sous-jacente des ordinateurs, en tant que machines de traitement symbolique ? Est elle mesurée par le degré de maîtrise du jargon et des équipements informatiques, ou bien par le niveau d'interaction consciente avec la machine, comme dans un dialogue inter-personnel ?
Dans la plupart des pays en développement, nous assistons à l'avènement de ce qu'on peut appeler un "double illettrisme" : les gens, déjà marginalisés, car privés des codes d'une société de l'écrire et du lire, pourraient bien, ne maîtrisant pas l'usage des ordinateurs, être désormais exclus du système.
Après que les banques eurent introduit les cartes à puces et les guichets automatiques -afin de faciliter la vie de leurs clients- les choses s'avérèrent plus complexes pour nombre d'utilisateurs des pays en développement. On peut constater des difficultés énormes quand des gens illettrés ou semi-illettrés doivent interagir avec un système informatique, même lorsqu'on demande simplement de rentrer un code numérique sur un clavier à 12 touches ou de pointer du doigt sur un écran tactile les chiffres correspondant à la somme d'argent qu'on veut retirer. Même si les adultes illettrés maîtrisent fréquemment l'usage des nombres et peuvent se livrer à des opérations arithmétiques simples dans leur routine quotidienne, comme rendre la monnaie correctement au marché du coin, utiliser le téléphone à touches ou bien choisir la bonne destination avec les bus, il semble pour une raison non-expliquée, que cela soit plus difficile pour eux de se débrouiller avec ces "machines du diable" d'un genre nouveau. Si l'on considère l'interactivité comme le noyau des technologies de l'information, alors il est nécessaire d'évaluer les conséquences d'une interactivité basée essentiellement sur un code écrit de communication dans des pays où une grande partie de la population est semi-illettrée, voire illettrée.
Interface homme/machine : dialogue ou contrôle ?
En tant que technologie qui ne peut manipuler que des données ou des symboles explicites, conformément à des règles syntaxiques formelles, les ordinateurs tendent à légitimer ceux des savoirs qui rentrent dans ce cadre et à dé-légitimer les autres. Les stratégies épistémologiques comme l'interprétation, l'intuition, l'introspection, voire la synthèse dialectique de réalités multiples et contradictoires, ne sont pas légitimées par l'informatique en tant que technologie. Michael Streibel souligne que plus les ordinateurs sont utilisés comme outils intellectuels, plus ce processus de légitimation/dé-légitimation s'accentue : "Plus nous nous appuyons sur les caractéristiques formelles du savoir, moins nous nous fondons sur les dimensions tacites de la connaissance et les facultés de médiation." (4)
S'il faut admettre qu'en informatique, l'aspect communication a été grandement amélioré par l'arrivée des techniques multi-média, en revanche la capacité des ordinateurs à appréhender les échanges humains demeure encore très restreinte. La plupart du temps, nos idées et émotions sont canalisées et se limitent à une pression sur les touches du clavier ou bien à un mouvement de la souris ou du manche à balai (joystick).
Les ordinateurs n'identifient pas encore l'utilisateur en tant qu'individu distinct : l'humain est traité par l'ordinateur en tant que type générique, et non comme une personne réelle. Bien que l'interface homme/machine tende à simuler des dialogues inter-individuels, Bork (5) souligne que ces dialogues instituent une forme de technologie comportementaliste, où les interactions conversationnelles sont contrôlées par un auteur qui n'est pas partie prenante de l'interaction réelle. Tandis que le contrôle commun constitue une composante naturelle des interactions individuelles, les programmes informatiques interactifs ne permettent pas à l'utilisateur de prendre des décisions, si ce n'est dans le cadre d'un ensemble de choix pré-définis. "L'existence de systèmes interactifs n'implique pas automatiquement un tournant démocratique, une redistribution du pouvoir du producteur au consommateur, ou une réorganisation du trafic informationnel" (6).
Un des défis majeurs de notre époque est de concevoir des systèmes informatiques qui possèdent un certain degré de compréhension et de bon )sens. L'ordinateur n'appréhende pas les unités d'information qu'il traite. Si les vecteurs de communication pouvaient identifier les contenus informationnels, on pourrait développer des systèmes personnalisés susceptibles de filtrer et de générer de l'information pour un interlocuteur individuel. Darley (7) affirme que si les technologies peuvent prendre "des formes créatrices, plus démocratiques et égalitaires, offrant de nouveaux types de savoirs, d'interactions et de compréhensions", alors on doit se battre pour que de telles possibilités voient le jour.
Devant un tel scénario, demandons nous quel devrait être notre responsabilité, en tant qu'artistes électroniques ? Comment les artistes peuvent-ils intervenir sur un tel processus, afin que soient pris en compte les aspects culturels, sociaux et humains dans le développement des technologies de l'information ? Le rôle d'un artiste utilisant des technologies émergentes au Sud est-il le même que celui pratiquant l'art électronique dans le Nord ?
Ces questions comportent deux aspects différents qui sont néanmoins fortement imbriqués. Le premier concerne les règles régissant le développement et l'implantation des technologies de l'information. Le second aspect est lié au dialogue inter-disciplinaire entre artistes et scientifiques.
Une approche unilatérale du transfert de technologie
A propos du premier aspect, il est important de considérer le développement technologique de l'informatique comme ayant une dimension internationale. Opérer sur une échelle mondiale suscite des problèmes liés à l'approche unilatérale du transfert de technologie - du Nord vers le Sud - et exacerbe le litige portant sur la domination culturelle. Raphaël Kaplinsky (8) centre son analyse sur les aspects conflictuels latents dans le transfert de technologie et sur les mécanismes utilisés pour renforcer le contrôle du groupe dominant. Il observe que n'importe quelle configuration de relations complexes entre différents individus ou groupes est susceptible de conduire à des incompréhensions et à des affrontements. Cependant, en ce qui concerne le transfert de technologie, "l'affrontement ne résulte pas simplement de l'incompréhension des intentions et des motivations des partenaires, mais il est fondamentalement inscrit dans la nature des transactions". La cause en est, d'après lui, que la technologie ainsi transférée "constitue non seulement une ressource de base pour la génération d'un surplus, mais également un élément important de contrôle dans la distribution du surplus".
Eduardo Galeano affirme qu'au Sud, les grandes métropoles de notre planète sont exactement semblables à celles du Nord, excepté qu'elles apparaissent à travers un miroir déformant : la reproduction d'un modèle de la modernité a pour effet de multiplier les défauts et les erreurs de l'original (9).
Ces problèmes se retrouvent également à l'échelle nationale. Le fossé déjà présent dans la plupart des pays en développement entre l'élite et les pauvres -dans certains cas, 10% de la population accaparent près de la moitié des richesses du pays (10)- est susceptible de s'accroître, ce phénomène résultant de l'introduction des technologies de l'information. L'individu illettré d'un pays en développement souffrira du double handicap de n'être ni un citoyen du Nord - avec tous les avantages technologiques que cela signifie - ni d'appartenir à un groupe restreint d'individus au Sud qui peuvent avoir accès à un ordinateur, et donc en maîtriser la logique et les compétences associées. L'introduction des ordinateurs dans la vie quotidienne sera d'autant plus agressive pour cet "homme dépossédé", qu'il deviendra progressivement incapable d'apprendre, de maîtriser et d'intervenir au moyen de cette nouvelle technologie. En définitive, les ordinateurs lui seront donc imposés.
Dans un rapport sur les perceptions picturales chez des sujets africains, William Hudson (11) affirme : "Nous tenons pour acquis que les méthodes qui rencontrent un succès, fût-il modeste, au sein de notre culture, se révéleront efficaces et même connaîtront la réussite dans une culture étrangère. Nous faisons l'erreur de penser l'esprit de l'homme noir comme une tabula rasa, qu'il conviendrait simplement de combler des bienfaits de notre propre expérience culturelle, afin de promouvoir les objectifs qui nous préoccupent, quels qu'ils soient. Nous oublions ou ignorons le fait que l'homme noir possède sa propre culture indigène".
Pour une "colonisation" des technologies nouvelles par les artistes
A la lumière de ces développements, nous pourrions conclure que l'introduction des technologies de l'information n'aboutira évidemment pas à une quelconque amélioration dans le champ du social, pour les pays en développement. Mais tout espoir n'est pas perdu. Roger Malina (12), en citant Marshall Mc Luhan lorsqu'il affirme que le rôle de l'artiste est d'explorer et de diffuser les nouveaux environnements offerts par la technologie, désigne les artistes contemporains comme des « colonisateurs de technologie ». Nous pouvons en déduire qu'on attend des artistes, en tant que colonisateurs, qu'ils explorent et délimitent de nouveaux territoires. Cependant, beaucoup de choses dépendent de notre perception de la situation réelle, de notre participation aux recherches technologiques, ainsi que de notre appréhension du possible et de ses frontières.
Cette conclusion nous amène au second point de notre discussion : le dialogue inter-disciplinaire entre artistes et scientifiques. Bien qu'à l'accoutumée, les méthodologies de ces deux groupes professionnels diffèrent, il est fallacieux d'isoler les activités humaines dans des catégories comme « art », « science » ou « technologie » : de nouveaux domaines de recherche émergent actuellement, conséquence d'une collaboration entre artistes et scientifiques. Que la logique artistique soit incorporée au processus de développement des nouvelles technologies constitue une nécessité. À défaut d'une telle préoccupation, les nouvelles technologies ne joueront pas leur rôle premier, qui est de satisfaire besoins et désirs humains. En tant qu'artistes, nous pouvons critiquer, interférer avec les tendances technologiques en déviant les directions inadéquates. Lorsque votre règle est tordue, elle est cintrée sur un côté ; pour redresser le tracé, il ne suffit pas de changer la règle de position ; il vous faut l'infléchir dans le sens opposé. C'est une des choses que les artistes électroniques peuvent faire avec/pour les nouveaux développements technologiques. Les technologues travaillant dans l'isolement sont loin de soupçonner la complexité des questions culturelles et sociales, et leur point de vue peut conduire la technologie vers un utilitarisme extrême. En tant qu'artistes, il nous faut l'infléchir dans le sens opposé, en tenant compte de la complexité de l'interaction homme/machine du point de vue socio-culturel. Comme synthèse de ces attitudes et points de vue opposés mais complémentaires, la technologie pourrait être perçue et utilisée par le grand public dans sa forme médiatique finale comme une somme de perspectives scientifiques et artistiques. Les champs technologiques, sociaux et humains de la connaissance n'auraient jamais du être séparés, en tant que parties complémentaires de l'expérience holistique de l'humanité.
Si nous voulons comprendre l'impact des ordinateurs sur la société, prétendent Winograd et Flores, alors "nous devons dévoiler l'entendement implicite du langage humain, comme dessein et oeuvre servant d'arrière-plan aux développements de l'informatique en tant que technologie." (13) En s'interrogeant sur ce que réalisent les ordinateurs, nous posons finalement la question fondamentale de savoir ce que signifie être humain. Les artistes électroniques découvrent graduellement des combinaisons du potentiel expressif des langues humaines naturelles -qui couvrent les domaines moraux, affectifs, artistiques, métaphoriques et esthétiques- ainsi que des spécificités procédurales, à caractère quantitatif et objectif, de l'informatique comme technologie.
Désormais, les points de vue des scientifiques et des artistes ne sont plus isolés du contexte socio-historique. Des facteurs économiques, politiques, culturels et géographiques affectent leur perception et guident leurs actions. Les artistes électroniques travaillant au Nord se distinguent nettement de ceux travaillant au Sud, non seulement en termes d'approches et de ressources, mais plus fondamentalement en termes d'accès aux technologies informatiques des développeurs. En ce qui concerne le problème du "double illettrisme" dans les pays en développement, les artistes électroniques du Nord pourraient intervenir, de manière plus directe que leurs collègues du Sud, car l'opportunité leur est réellement offerte de prendre part au développement de nouvelles tendances au sein des technologies de l'information.
Simon Penny annoncait dans un article récent (14) l'avènement d'une nouvelle identité professionnelle : "L'artiste des nouveaux médias interactifs, un inter-disciplinaire, aussi familier avec les langages informatiques qu'avec les codes culturels...". Nous pouvons faire pénétrer l'informatique dans une ère porteuse de nouvelles valeurs culturelles, comme élément d'un dialogue interactif entre les machines et les humains. L'art et la science doivent fusionner en un seul processus cognitif. Artistes et technologues, au Nord comme au Sud, peuvent allier une connaissance et des perceptions différentes afin d'élaborer un langage électronique, autorisant une expression qualitative et dialectique de l'expérience.
Le temps est venu d'adopter une telle démarche. En fait, le défi principal de cette décennie consiste à fonder un engagement socio-technique capable d'aborder les problèmes tant à l'échelle locale que globale. Dans un monde de disparités économiques, culturelles et sociales, maintenir un équilibre entre originalité et uniformité doit être le principal combat des artistes électroniques contemporains. Peut-être, chemin faisant, en récolterons nous les fruits.

Notes

  1. Streibel Michael J., A Critical Analysis of The Use of Computers in Education, ECJT, 34 (3), Automne 86, p. 137.
  2. Negroponte Nicholas, Como por o mundo em nossos eixos, O Globo Informatica, Mai 1993, interview.
  3. Freire Paulo, Pedagogia do oprimido, Paze Terra, Rio de Janeiro, 1979.
  4. Streibel, op. cit., p. 154.
  5. cité dans Streibel, op. cit., p. 149.
  6. Huhtamo Erkki, It is interactive - but is it Art?, ACM SIGGRAPH'93 Computer Graphics Visual Proceedings, ACM, New York, 1993, p. 133.
  7. cité dans Huhtamo, op. cit., p. 135.
  8. Kaplinsky Raphaël, Accumulation and the Transfer of Technology: Issues of Conflict and Mechanisms for the Exercise of Control, World Development, 4 (3), Mars 1976, pp. 197-224.
  9. Galeano Eduardo, Ser como Eles, Editora Revan, Rio de Janeiro, 1993.
  10. Brazil, Time to get moving, The Economist, Avril 1993, p. 21.
  11. Hudson William, The study of the problem of pictorial perception among unacculturated groups, Int. J. of Psychology, 1967, 2(2), p. 90.
  12. Malina Roger F, Computer Art in the context of the journal Leonardo, Leonardo Computer Art in Context, Supplément, 1989.
  13. Winograd Terry et Flores Fernando, Understanding computers and cognition: a new foundation for design, Ablex Publish. Corp., New Jersey, 1986.
  14. Penny Simon, Machine Culture: the virtual frontier, ACM SIGGRAPH'93 Computer Graphics Visual Proceedings, ACM, New York, 1993, p. 111.

Traduction de l'anglais par Dominique Desbois